Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Chaque jour, les tendances de la tech et l'IA par Jean Rognetta et Maurice de Rambuteau

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Par QANT: Révolution cognitive et Avenir du numérique
16 juin · 2 mn à lire
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Colosses et Cliffhangers

ÉDITORIAL. Après six semaines de conférences pour les développeurs, tous les géants de l'IA ont montré leur jeu et leurs feuille de route. Il est donc temps de tirer les conclusions de l’IA, saison 2. En trois mots : bulle, données, agents.

« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio

Colosses et Cliffhangers

OpenAI. Google I/O. Microsoft Build. Computex, que Nvidia a détourné à son avantage quasi-exclusif. Et enfin Apple, toute la semaine dernière. En un mois et demi, tous les grands de l’IA ont livré leurs feuilles de route aux développeurs d’applications et dans une moindre mesure aux analystes financiers. Six semaines pour trois leçons.

Ou plutôt trois cliffhangers, financier, social et technologique.

Depuis janvier, son identification à l'IA détermine de plus en plus la capitalisation d'un groupe tech  • Source : FinancialCharts.comDepuis janvier, son identification à l'IA détermine de plus en plus la capitalisation d'un groupe tech • Source : FinancialCharts.com

La bulle financière sur l’IA est caractérisée, mais quand explosera-t-elle ?

La balançoire boursière qui fait monter et, bien plus rarement, descendre Apple, Nvidia et Microsoft montre désormais tous les signes de « l’exubérance irrationnelle » qui avait caractérisé la bulle Internet à la fin des années 1990. Les investisseurs croient à l’arrivée d’une « nouvelle économie » grâce à la technologie ; ils s’endettent pour spéculer sur les champions qu’elle fera émerger ; l’hyperbole médiatique ne fait qu’amplifier leur comportement moutonnier.

La bulle IA peut pourtant gonfler encore pendant plusieurs mois, sinon plusieurs années. Tout CEO qui veut garder son job se doit en effet désormais de multiplier les investissements dans l’IA. Tout VC qui lève des fonds se dote d’une stratégie d’investissement dans l’IA. Même si les financements en amorçage ralentissent dans la Silicon Valley, le carnet d’ordres de Nvidia et de TSMC est plein au moins jusqu’en 2025.

Tant que l’argent affluera, la bulle gonflera et, comme pour Internet, elle posera les bases des changements qui suivront son explosion.

An AI Cliffhanger • Qant avec Dall-eAn AI Cliffhanger • Qant avec Dall-e

Pourquoi tout le monde a-t-il peur de l’IA ?

Les investisseurs semblent être les seuls qui n’ont pas peur de l’IA. Du côté de la tech, les craintes ne cessent de se renforcer.

Du côté d’OpenAI, malgré les sévères pénalités financières pour ceux qui partent, les langues se délient. Un flot continu de lanceurs d’alertes met en garde contre l’arrivée prochaine de l’intelligence artificielle générale. Grâce à Daniel Kokotajlo et Leopold Aschenbrenner, on sait désormais qu’OpenAI maintient une distribution probabiliste sur son avènement. La valeur modale, la plus grande probabilité, est toute proche : 2027.

À l’ombre des pommiers en fleur, Apple ne va vers l’IA que contrainte et forcée. Tout dans sa présentation, lundi dernier, a montré le manque d’enthousiasme du géant pour « Apple Intelligence », reléguée à la toute fin. Le partenariat avec OpenAI a été minimisé. L’utilisateur devra chaque fois confirmer son consentement pour sortir de l’enceinte sécurisée du walled garden de la Pomme, et ChatGPT sera dès que possible mis en concurrence avec Gemini et, peut-être, Claude d’Anthropic.

La réaction furibonde d’Elon Musk a fait presque autant de bruit que l’intégration de l’IA par Apple. À l’en croire, l’intégration de ChatGPT dans iOS, iPadOS et MacOS fera des appareils d’Apple des machines à espionner, non seulement leurs utilisateurs, mais tout leur environnement. Au point que Tesla envisagerait de faire enfermer les iPhones dans des cages de Faraday à l’extérieur de ses usines.

Quant à Google, chacun de ses lancements d’IA se conclut par un échec : après Bard, AI Overviews a dû être remisé en catimini. De quoi apprendre la prudence.

Quand les agents d’IA se généraliseront-ils ?

Il faudra attendre Meta Connect, fin septembre, pour que les optimistes de l’IA, comme le prix Turing Yann Le Cun, retrouvent une tribune mondiale. D’ici là, le mouvement de l’open source dans l’IA devra rattraper la tendance à « l’agentivité » qui se dessine de plus en plus clairement.

Tout comme Gemini Nano s’installe au cœur des téléphones Android – pourvu qu’ils aient plus de 8 Go de RAM –, Apple Intelligence se greffe sur les systèmes d’exploitation d’Apple, en commençant par iOS18 et l’iPhone 15 Pro (qui lui aussi dispose de 8 Go de RAM). Ces « LLM-OS », comme on commence à les appeler, s’entraînent sur l’ensemble des données de l’utilisateur disponibles dans le téléphone et en appellent au cloud quand ils manquent de capacités de calcul. Ils disposent bien sûr de fonctionnalités génératives : un emoji-ci, un brouillon de mail-là, des traductions simultanées et un assistant multimodal polyglotte un peu partout. Mais pas seulement.

Au-delà de l’IA générative, les modèles dans le téléphone exercent des fonctions de surveillance et de sécurité. Google a par exemple fait la démonstration d’un appel téléphonique frauduleux interrompu par une notification de Gemini Nano. Apple Intelligence, qui peut enregistrer, transcrire et résumer chaque appel, dispose sans doute des mêmes capacités. Les assistants multimodaux, Siri et Google, deviennent capables de proposer à l’utilisateur des services complexes. Ils peuvent s’appuyer sur toutes les sources et les apps disponibles : e-mails, messages, sites Web, agenda, calcul d’itinéraires… Puis, selon les indications de l’utilisateur, ils peuvent déplacer des rendez-vous, commander des voitures, etc. Leur puissance n’est bridée que par la sécurisation de l’accès au cloud, ce qu’Apple tente de résoudre en créant un cloud privé.

Les deux géants des smartphones, Google et Apple, ont ainsi présenté aux développeurs un avenir où leurs plateformes proposeront une multitude d’agents d’IA. Ces successeurs des apps se baseront sur le LLM dans le téléphone. L’opérateur de la plateforme veillera à la sécurité des données, via un cloud privé par exemple, et il se rémunérera par une commission – de 30%, dans le cas d’Apple.

Il faut que tout change pour que rien ne change.

Jean Rognetta

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