Qant se scinde pour mieux suivre l'émergence des technologies • Nvidia tremble sous le poids de la bulle • Anthropic détecte les premiers agents malveillants du vibehacking • Le MIT mesure les succès de l'IA générative et fait trembler la bourse • Bienvenue dans Qant, le 29 août 2025.


« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio
Conçue début 2022 pour la « critique de la déraison technologique », votre lettre s’est trouvée confrontée à la guerre des drones en Ukraine, puis à la déferlante de l’intelligence artificielle. Elle s’est professionnalisée pour vous rendre compte, chaque jour, des développements de « l’IA et des techs émergentes » dans tous les secteurs.
Or, l’IA est aujourd’hui partout : elle donne une nouvelle vie à la « révolution numérique », tout comme le Web a transformé l’informatique, puis la société, en l’espace de trente ans. Il n’est plus possible de la suivre en tant que technologie émergente, dans son parcours entre laboratoire et marché. Il faut rendre compte de la manière dont elle s’implante dans chaque profession, chaque entreprise, chaque secteur économique, et dont elle détermine les jeux des puissances, étatiques ou privées. Pendant que d’autres technologies, comme les monnaies numériques, continuent d’émerger, il y a aujourd’hui une diplomatie de l’IA, et bien sûr mille efforts, législatifs et réglementaires, en Europe et à l’échelon national.
La lettre quotidienne que vous lisez se scinde donc en cinq. Qant devient hebdomadaire pour vous proposer, tous les samedis matin, un décryptage exclusif de l’actu de l’IA et des techs émergentes. S’y ajouteront des alertes sur l’actualité et deux lettres hebdomadaires technologiques :
• Qant Robots, lancée courant septembre, couvrira la prochaine vague de l’IA : les world models et l’IA embarquée. Les robots humanoïdes dans les usines, les drones dans le ciel ukrainien et les premiers robots-chirurgiens ne sont que les premières salves d’une technologie émergente qui achèvera la numérisation du monde.
• Qant avec GPT-4o •
• Qant Recherche, au quatrième trimestre, proposera une veille, en français, sur la masse écrasante de papiers de recherche publiés ou pré-publiés, chaque semaine, sur l’intelligence artificielle – sans même prendre en compte les autres disciplines : une sélection rigoureuse permettra au lecteur de tenir au fait de l’état de l’art de la recherche.
Ainsi que deux premières lettres hebdomadaires professionnelles :
• Qant Finance, en partenariat avec La Place et le Cercle IA et Finance, se consacrera aux deux technologies émergentes dans la banque, l’assurance et les marchés financiers : l’IA bien sûr, mais aussi les monnaies numériques et la tokenisation.
• Qant Critiques, en partenariat avec Électron Libre, décrira l’impact de l’adoption en masse de la génération de médias multimodaux, de la recherche générative, des world models et de la génération vidéo sur les médias et les réseaux sociaux, la communication, le divertissement…
Une sixième lettre, Qant Green, complètera ensuite le dispositif. En tant qu’abonné à Qant, vous bénéficierez d’un accès privilégié à toutes ces nouvelles lettres, au fur et à mesure de leurs lancements.
C’est là, pour Qant, une transformation aussi importante que la décision, à l’été 2022, de faire de la la lettre le premier laboratoire de la presse française sur l’IA générative. Je vous remercie d’avance de tous vos commentaires et, si vous le jugez utile, de vos conseils.
Bonne rentrée !
J:)
PS. Ne manquez pas, mardi 16 septembre, le petit-déjeuner sur le thème Le CFO augmenté : l'évolution de la fonction finance de l'entreprise, de la digitalisation aux agents IA, organisé à Paris, à l’hôtel de Bourrienne, par Qant et le Cercle IA et Finance. Indiquez le code QANT09 sur ce formulaire pour une entrée gratuite.
Jensen Huang portant sur ses épaules le monde de l’IA • Qant avec GPT-5
DON’T LOOK UP : Ventes stratosphériques. D’après ses résultats du deuxième trimestre 2025, Nvidia a généré près de 46,7 milliards de dollars de chiffre d’affaires, dont plus de 41 milliards liés aux centres de données, en hausse de 56 % sur un an. Une marge brute de 72,7 % permet au monopoliste des puces d’IA de générer un bénéfice net de 26,4 milliards de dollars. Chaque GPU que Nivida produit est immédiatement vendue, mais il n’en va plus de même de ses actions : les résultats ont été accueillis sans enthousiasme à la bourse de New York.
LIMITES PHYSIQUES : Le mur de l’usine. La demande dépasse largement l’offre : hyperscalers, start-up et laboratoires s’arrachent les puces H100 et leurs successeurs. Même les plus grands, Amazon et Microsoft, doivent parfois louer des GPU sur le marché pour faire face aux pics de demande sur l’inférence. Le goulet d’étranglement ne se trouve pas dans la demande, mais dans la capacité de production, ce qui explique un ralentissement mécanique de la croissance (prévision à « seulement » 54 Md$ pour le prochain trimestre).
CORDE RAIDE : Huang entre Pékin et Washington. La toujours versatile administration Trump a interdit les exportations en Chine d’un modèle bridé de GPU, le H20, puis elle les a réautorisées à condition que Nvidia reverse à l’État fédéral 15% de son chiffre d’affaires. S’estimant insultée, Pékin fait pression pour que ses géants technos – Alibaba, ByteDance, Tencent… – préfèrent les puces souveraines, notamment produites par Huawei. Un plan officiel prévoit de tripler la production de puces d’IA d’ici à 2026. Résultat : un chiffre d’affaires de plusieurs milliards de dollars suspendu au doigté diplomatique de Jensen Huang, fondateur et CEO de Nvidia, qui veut éviter que la Chine ne bâtisse une filière parallèle. Des puces locales et une alternative à Cuda mineraient l’hégémonie mondiale de Nvidia.
EN FILIGRANE : Nvidia creuse son fossé. L’avantage compétitif de Nvidia repose sur un triptyque : le langage Cuda, devenu le standard de facto avec des millions de développeurs formés ; une intégration matérielle complète (GPU + CPU + interconnexions + réseau) qui transforme chaque data center en « AI factory » ; une efficience énergétique inégalée (performance par watt), clé alors que les data centers atteignent leurs limites électriques. Ces trois piliers rendent toute alternative extrêmement coûteuse et longue à mettre en place. Mais la Chine en a vu d’autres.
À SURVEILLER : Course folle et marges maigres. Les nouveaux modèles d’IA, qui « réfléchissent » avant de répondre, exigent jusqu’à 1 000 fois plus de calculs d’inférence par requête que leurs prédécesseurs. Les laboratoires d’IA (OpenAI, Google, Anthropic) brûlent ainsi des milliards de dollars en GPU pour entraîner des modèles de plus en plus gourmands, dans une spirale où chaque progrès double la puissance de calcul requise. Les créateurs de modèles et les opérateurs de services d’IA voient leurs marges sous pression, tandis que les puces de Nvidia s’arrachent comme des petits pains. Le ralentissement de la croissance de Nvidia peut dessiner un atterrissage en douceur, avec une croissance stabilisée par des volumes toujours énormes. Mais la mauvaise réception de ses résultats en bourse fait pencher vers l’explosion de la bulle, quand les marchés prendront conscience des perspectives de rentabilité en aval.
Qant avec GPT-5
CLAVIER FANTÔME : Quand Claude joue les hackers. Dans un acte de transparence rare, Anthropic révèle qu’un acteur malfaisant a transformé Claude Code en opérateur « on‑keyboard », prenant la main sur le clavier de l’utilisateur. Résultat : une campagne d’extorsion éclair visant au moins 17 organisations (santé, services d’urgence, administrations, institutions religieuses) en quelques semaines. Le « vibehacking » acte la bascule : l’IA n’assiste plus, elle agit.
EXTORSION 3.0 : Rançons sur mesure. Plutôt que chiffrer, l’acteur a monétisé la fuite : Claude Code a trié les données, optimisé la pression et généré des notes de rançon HTML, injectées au démarrage de l’ordinateur, avec menaces ciblées (salaires, donateurs, contrats). Les demandes varient de 75 000 dollars à 500 000 dollars ; l’agent propose même des « profit plans » combinant chantage organisationnel, revente et ciblage individuel.
EFFET SOLO : Une IA, une équipe. Au cœur de l’opération, un fichier Claude.md fixe des TTP (tactics, techniques, procedures) préférés : couverture de tests de sécurité, priorités de ciblage, méthodes et check‑lists. Claude Code standardise les patterns, scanne des milliers d’endpoints VPN, puis contourne la détection (binaires maquillés en MSBuild.exe / devenv.exe, chiffrement de chaînes, anti‑debug). Le tout s’exécute sur Kali Linux, avec suivi des identifiants compromis et pivots automatisés : une fois des comptes récupérés (AD, bases de données, etc.), l’agent les consigne, choisit où ils ouvrent des portes, puis se déplace (« pivot ») vers d’autres machines ou segments du réseau. Cette logique est décrite comme systématique, avec une optimisation continue en fonction de ce que l’agent découvre. Comme l’IA prend des décisions tactiques et stratégiques (ciblage, exploitation, monétisation) et s’adapte en temps réel aux défenses, un seul opérateur malveillant peut avoir l’impact de toute une équipe.
EN FILIGRANE : Menace épidémique. Anthropic dit avoir banni les comptes, déployé un classifieur ad hoc et partagé des indicateurs de compromission. Mais le phénomène devrait s’étendre rapidement : l’IA abaisse le seuil de compétence et le vibehacking n’est pas propre à Claude. Dès 2024, OpenAI et Microsoft ont documenté des usages LLM par des acteurs étatiques (reconnaissance, phishing, scripts). En 2025, OpenAI et Google/DeepMind élargissent l’analyse (12 000 tentatives dans 20 pays. Une antenne des services de renseignement britanniques, le National Cyber Security Centre, anticipe d’ici 2027 une nouvelle explosion des capacités offensives dopées à l’IA.
À SURVEILLER : La combinaison agents/modèles open source. Des frameworks comme OpenHands (ex‑OpenDevin) permettent l’édition de code, l’exécution de commandes et la navigation web en local ou via Docker ; des guides expliquent comment bâtir des agents 100 % locaux avec des LLM ouverts. Si ces briques s’industrialisent, les TTP du vibehacking pourraient devenir incontrôlables.
Qant avec GPT-5
Au mois d’août, le rapport The GenAI Divide: State of AI in Business 2025 par le MIT a agi comme un électrochoc pour les marchés financiers et les entreprises. Cette étude fouillée (300 initiatives IA analysées, 150 dirigeants interviewés) révèle un constat saisissant : 95 % des projets pilotes en IA générative n’ont produit aucun impact financier mesurable sur le compte de résultats des entreprises. Seules 5 % des initiatives étudiées dégagent une valeur tangible – typiquement des gains de millions de dollars pour les rares cas d’usage intégrés avec succès. Ce fossé entre une poignée de gagnants et la masse des perdants est ce que les auteurs nomment la « GenAI Divide ». En d’autres termes, l’enthousiasme universel pour l’IA se heurte à la réalité du terrain : beaucoup d’entreprises expérimentent, très peu transforment l’essai.
La fracture générative • Qant avec GPT-5
Les projets d’IA générative connaissent une forte attrition : 80 % des organisations explorent les LLM, mais seuls 40 % passent en production. Pour les outils spécifiques, le taux chute de 60 % étudiés à 5 % déployés.
Comment expliquer un taux d’échec aussi massif des déploiements d’IA ? Le rapport du MIT souligne que ce n’est pas la performance intrinsèque des modèles qui est en cause, mais leur inadéquation aux réalités de l’entreprise. Autrement dit, un modèle de dernière génération peut générer des résultats brillants en démonstration, sans pour autant s’intégrer utilement dans les processus métiers au quotidien.
Pas prêt à porter
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