Pied de nez anglais à l'ouverture de Vivatech

IA dans la finance, robotaxis : la Grande-Bretagne accélère, l’Europe reste immobile • Un souffle Magistral : à Vivatech, Mistral se lance dans le raisonnement • OpenAI atteint les 10 milliards de dollars d’ARR • The Blockchain Group veut faire son Strategy • Apple explore les limites des LLM • Bienvenue dans Qant, mercredi 11 juin 2025.

« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio

Nvidia offre un bac à sable IA à la City

Le régulateur financier britannique lance un partenariat inédit avec Nvidia pour permettre aux banques d’expérimenter l’intelligence artificielle dans un cadre sécurisé et supervisé.

Le premier ministre britannique Keir Starmer et le CEO de Nvidia Jensen Huang • Photo : Nvidia

  • La Financial Conduct Authority (FCA) a annoncé le lancement d’un programme spécifique, Supercharged Sandbox, pour aider les établissements financiers à tester des outils d’intelligence artificielle.

  • Ce partenariat avec Nvidia fournira un accès à ses logiciels et à ses capacités de calcul accéléré dès octobre 2025.

  • Le dispositif vise les acteurs en phase d’exploration et d’expérimentation, en leur offrant données, expertise technique et accompagnement réglementaire.

  • L’initiative répond à des blocages persistants dans le déploiement de l’IA dans la finance, notamment autour des risques de fraude, de confidentialité et de conformité.

  • À SURVEILLER : Vivatech, la London Tech Week, Nvidia et le père Noël (en juin). Le bac à sable a été annoncé au moment du passage de Jensen Huang, CEO de Nvidia, à la London Tech Week qui, par un pied de nez très britannique, s’est ouvert lundi, deux jours avant l’événement parisien. Jensen Huang s’exprimera ce matin à la tribune de Vivatech. La finance française n’aura peut-être pas de bac à sable mais le nucléaire, qui sait.

Un nouveau cap pour OpenAI

La société affirme avoir atteint 10 milliards de dollars de revenus annuels récurrents, dopés par l’usage massif de ses produits destinés aux particuliers et aux entreprises.

  • Deux ans et demi après le lancement de ChatGPT, OpenAI a indiqué avoir atteint 10 milliards de dollars de revenus annuels récurrents, contre environ 5,5 milliards l’année précédente.

  • Ce chiffre inclut les recettes générées par trois sources : les produits grand public, les offres pour entreprises liées à ChatGPT et l’accès à son API.

  • L’entreprise revendique plus de 500 millions d’utilisateurs actifs chaque semaine, ainsi que 3 millions de clients professionnels payants.

  • À SURVEILLER : Le point d’équilibre. L’objectif affiché est de 125 milliards de dollars d’ARR d’ici à 2029 (plus que le PIB de la Bulgarie et presque autant que celui de la Slovaquie ou du Maroc). Mais les investissements d’OpenAI sont tout aussi faramineux.


Ce qui nous rend humains… même face à l’intelligence artificielle

Et si une IA faisait une pause pour regarder… CANAL+ ?

En partenariat commercial avec Canal+

L’intelligence artificielle peut-elle comprendre les émotions humaines ou se limite-t-elle à les identifier sans jamais les ressentir ? C’est la question audacieuse que CANAL+ explore avec l’installation artistique innovante imaginée en collaboration avec le collectif Obvious et l'agence BETC.

Pendant quatre semaines, une intelligence artificielle matérialisée par un robot humanoïde spécialement conçu par Obvious a été mise face à un panel riche et diversifié de contenus audiovisuels issus de l’offre CANAL+. Films, séries et documentaires ont ainsi été passés au crible d’un algorithme sophistiqué, capable d’analyser précisément les expressions émotionnelles humaines telles que la joie, la peur, la colère ou encore l’amour.

Malgré cette capacité technique remarquable, l'expérience a mis en évidence une limite fondamentale : l’IA analyse mais ne ressent pas. En mettant ainsi l’humain au cœur de sa réflexion, CANAL+ rappelle avec force que, même à l’ère des algorithmes omniprésents, la création artistique demeure profondément liée à la singularité émotionnelle humaine.

Découvrez cette expérience immersive et visionnez les réactions inédites de l’IA face aux contenus de CANAL+ dans la vidéo de la campagne ici.


À Vivatech, Mistral veut tenir un raisonnement Magistral

Alors qu’OpenAI rend disponible o3-Pro, la start-up française lance sa première gamme de modèles de raisonnement, avec un accent sur les langues européennes et une disponibilité en open source.

  • À l’occasion de Vivatech, Mistral présente Magistral, sa première famille de modèles de raisonnement, conçue pour traiter les problèmes étape par étape dans des domaines comme les mathématiques, la physique ou la logique.

  • Deux versions ont été dévoilées : Magistral Small, un modèle de 24 milliards de paramètres disponible en open source sous licence Apache 2.0, et Magistral Medium, accessible via l’API de Mistral, sa plateforme Le Chat et des clouds partenaires.

  • Magistral se distingue par sa capacité à raisonner en plusieurs langues européennes, avec un support prévu pour d’autres langues comme l’arabe, le russe et le chinois simplifié.

  • EN FILIGRANE : Des performances moyennes. Magistral Medium reste en retrait face à Gemini 2.5 Pro ou Claude Opus 4 sur des benchmarks en sciences, mathématiques et programmation. En attendant la version de raisonnement de Mistral Large, la start-up française met en avant la rapidité d’exécution de Magistral, jusqu’à dix fois supérieure à celle de certains concurrents, ainsi que certains cas d’usage d’optimisation opérationnelle ou de prise de décision stratégique.

  • À SURVEILLER : o3-Pro gâche la fête. Au grand événement tech de Paris, qui s’ouvre aujourd’hui, le fondateur de Mistral Arthur Mensch devait recevoir un accueil presque aussi triomphal que Jensen Huang, fondateur de Nvidia, et Fidji Simo, la Sétoise devenue n°2 d’OpenAI. Toujours espiègle, son entreprise a choisi ce jour pour lancer o3-Pro, dont les performances éclipseront Magistral – pour une fois, OpenAI ne prend pas Google pour cible, mais Mistral. Presque un honneur.

Lovable, Meta

  • Vibecoding : Lovable is in the air • La start-up suédoise Lovable, spécialisée dans le développement d’applications assisté par IA pour non-programmeurs, discute d’une levée d’au moins 100 millions de dollars auprès d’investisseurs américains, sur la base d’une valorisation d’au moins 1,5 milliard, selon Bloomberg. Fondée en 2023, l’entreprise revendique 130 000 clients payants, 61 millions de dollars de revenus récurrents annuels et une croissance rapide, notamment auprès des utilisateurs sans expérience en codage. Malgré des failles de sécurité signalées en mai, Lovable affirme les avoir corrigées et renforcé ses protections. Elle a levé 22,5 millions de dollars à ce jour. En savoir plus… 

  • Zuckerberg mobilise pour l’AGI • Mark Zuckerberg recrute personnellement une cinquantaine d’experts pour constituer une nouvelle équipe dédiée à l’intelligence artificielle générale (AGI). Ce « superintelligence group », installé près de lui au siège de Menlo Park, s’inscrit dans une stratégie plus large, incluant le probable investissement de plusieurs milliards de dollars dans Scale AI (lire Qant du 10 juin), dont le fondateur Alexandr Wang pourrait prendre la tête de l’équipe. Cette initiative fait suite à la déception interne autour des performances de Llama 4 et au report du modèle « Behemoth ». En savoir plus…

Pourquoi Apple ne croit pas à l’IA

Ou du moins, à la toute-puissance des LLM.

Les limites des LLM. • Qant, M. de R. avec GPT-4o

Les grands modèles de langage (LLM) ont circonscrit le plateau qu’ils avaient atteint grâce à “l’inference-time compute”, la technique à la base des modèles de raisonnement comme GPT o3 et Claude 4. Une étude récente de chercheurs d'Apple conduit à relativiser ces progrès, en montrant que même les modèles les plus récents échouent à généraliser de manière fiable au-delà des données de leur entraînement : ils interpolent, mais n’extrapolent pas.

Pour les chercheurs d’Apple, ces constats ne remettent pas en cause l’intérêt de l’intelligence artificielle, mais ils plaident pour une redéfinition des objectifs. L’ambition ne devrait pas être de simuler le raisonnement humain, mais de combiner la puissance de calcul des machines avec des capacités de raisonnement explicite, symbolique et contrôlable. Les LLM continueront à offrir des usages utiles – rédaction et synthèse de textes, génération de code, assistance… Mais ils ne constituent pas, à ce jour du moins, une voie directe vers une intelligence artificielle générale. 

Une approche rafraîchissante, dans un monde de la recherche aussi fasciné par l’IA que Mary Meeker. Mais qui peut expliquer le retard pris par la firme à la Pomme.

Vers des robotaxis à Londres

Uber lance un partenariat avec la start-up londonienne Wayve pour tester des véhicules totalement autonomes dans la capitale britannique en 2026. Sa lourdeur réglementaire dessert l’Union Européenne.

  • Uber prévoit de tester dès le printemps 2026 à Londres des trajets en robotaxi, en collaboration avec la start-up britannique Wayve, spécialisée dans les logiciels de conduite autonome. 

  • Ce sera le premier test en conditions réelles de niveau 4 pour Uber au Royaume-Uni, où aucun conducteur de sécurité ne sera présent dans le véhicule. 

  • Le lancement de ce pilote a été rendu possible grâce à un nouveau cadre accéléré pour les essais commerciaux de véhicules autonomes, récemment introduit par le ministère britannique des Transports.

  • EN FILIGRANE. Wayve, soutenue par SoftBank, a déjà équipé des véhicules de livraison à Londres avec sa technologie basée sur l’intelligence artificielle, capable de gérer des environnements urbains complexes sans intervention humaine.

  • À SURVEILLER : Le poids de la réglementation. Volkswagen et Honda ont mené quelques essais de véhicules autonomes de niveau 4 en Allemagne, le seul pays de l'Union Européenne qui les autorise. Le cadre réglementaire britannique, plus souple, se montre ici bien supérieur à la lourdeur de l’Union pour l’adoption de l’innovation.

Waymo

  • Les robotaxis s’arrêtent à Los Angeles • Waymo, la filiale de véhicules autonomes d’Alphabet, a suspendu son service de robotaxis dans le centre de Los Angeles, après que plusieurs de ses voitures ont été incendiées lors de manifestations contre des raids migratoires. Waymo, qui affirme ne pas être visée directement, a retiré ses voitures avec l’appui de la police locale (et non de la garde nationale ou des marines déployés par Trump). Des trottinettes Lime ont également été brûlées. Mais le coût d’un taxi Waymo est de l’ordre de 150 000 dollars. En savoir plus…

The Blockchain Group veut profiter de la bulle bitcoin

Cotée sur Euronext Growth, TBC veut émuler Strategy et Metaplanet et devenir le pionner européen de l’accumulation de bitcoin, le modèle spéculatif à la mode.

  • La société parisienne The Blockchain Group lance une série d’augmentations de capital “at-the-market” (ATM) pour 340 millions d’euros, afin d’accroître son stock de bitcoin. Le montant levé total pourra être porté à 500 millions.

  • L’exécution de ce programme est confiée à la société de gestion Tobam, par ailleurs actionnaire de l’éditeur de logiciels. Elle écoulera les actions au gré du marché, dans la limite de 21 % du volume échangé le jour précédent.

  • L’opération implique une dilution de plus de 90 % des actionnaires existants, confrontés en 2023 à des pertes massives (22 M€ contre 20 M€ de chiffre d’affaires), qui ont mené au pivot comme Bitcoin Treasury Company (BTC), à l’instar du tournant pris en 2020 par Microstrategy, alors éditeur de logiciels coté au Nasdaq. 

  • Après avoir lancé sa stratégie d’acquisition en fin d’année dernière, The Blockchain Group détient actuellement 1 471 bitcoins, soit environ 140 millions d’euros au prix actuel. 

  • EN FILIGRANE. L’éclosion des Bitcoin Treasury Companies. Le repositionnement de The Blockchain Group imite celui de l'américaine Strategy, qui a accumulé 582 000 bitcoins, soit plus de 63 milliards de dollars, ou encore de la japonaise Metaplanet, qui vient de lancer une levée de fonds de 5,4 milliards de dollars pour en acheter. À ce jour, 7 sociétés détiennent des bitcoins pour plus d’un milliard de dollars : outre Strategy, on retrouve Marathon Digital, Riot Platforms CleanSpark, Tesla, Hut 8 et Coinbase. Hut 8 est alliée à la famille Trump, qui a levé presque 2,5 milliards pour acheter des bitcoins. 

  • À SURVEILLER : Du papier pour des octets. Il reste moins de 1,5 million de bitcoins à “miner” sur le total de 21 millions prévus par le protocole et le rythme de création ralentit régulièrement. Les spéculateurs se basent sur cette caractéristique déflationniste pour juger que la valeur du bitcoin ne pourra qu’augmenter et qu’il suffit d’en acheter sans jamais les vendre pour créer de la valeur pour ses actionnaires, d’autant plus si on les gage pour en acheter d’autres. Il n’est pas clair, toutefois, quelle est la valeur créée par la Bitcoin Treasury Company, alors que l’actionnaire pourrait acheter ses bitcoins lui-même. Ni comment les BTC feront face aux appels de marge en cas de recul du prix du bitcoin.

Société Générale

  • Un nouveau stablecoin dollar sort de la Forge • SG-Forge, la branche crypto de la Société Générale, a lancé un stablecoin adossé au dollar américain, baptisé USD CoinVertible (USDCV), sur les blockchains Ethereum et Solana. Destiné aux règlements et paiements institutionnels, il sera adossé à des réserves conservées par BNY Mellon et complétera l’euro-stablecoin EURCV lancé en 2023. USDCV vise des cas d’usage comme le trading, les paiements transfrontaliers et la gestion de collatéral. Il sera distribué via des plateformes d’échange, courtiers et prestataires de paiement, hors du marché américain. Le début des transactions est attendu en juillet. En savoir plus…

IonQ piège Oxford Ionics

Le spécialiste américain du quantique à ions piégés IonQ acquiert une start-up issue de l’université d’Oxford pour plus d’un milliard de dollars.

  • IonQ, cotée au Nasdaq, vient de racheter la start-up Oxford Ionics dans une opération valorisée à 1,1 milliard de dollars, dont 10 millions seulement en numéraire.

  • Oxford Ionics, fondée en 2019, avait levé depuis environ 50 millions de dollars. Elle est spécialisée dans les puces quantiques à ions piégés. Dans la même technologie, IonQ propose des ordinateurs quantiques accessibles via AWS, Azure, Google Cloud et sa propre plateforme, ainsi qu’un système d’exploitation, des systèmes matériels et des services reliés.

  • En particulier, Oxford Ionics a développé une technologie de capture d’ions fabriquée à partir de puces microfabriquées selon des procédés standards. Cela permet une miniaturisation et une production à grande échelle des composants quantiques, qui pourra favoriser l’évolutivité des ordinateurs quantiques d’IonQ.

  • Les puces d’Oxford Ionics présentent une grande précision des portes quantiques, avec des performances expérimentales atteignant 99,99916 % pour les portes à un qubit et 99,97 % pour les portes à deux qubits.

  • À SURVEILLER : Puissance et précision. L’accord vise à combiner les puces semi-conductrices d’Oxford Ionics avec le matériel et les logiciels d’IonQ pour développer un ordinateur quantique de 256 qubits physiques l’an prochain, 10 000 en 2027 et 2 millions d’ici 2030, avec une précision qui doit croître pari passu. En attendant, elle permet à IonQ de constituer une pile technologique complète. 


EN EXCLUSIVITÉ POUR LES ABONNÉS :

• Une étude menée par Apple montre les limites des grands modèles de langage.

Pourquoi Apple ne croit pas à l’IA

Une équipe de chercheurs de la firme à la Pomme met en évidence les lacunes persistantes des modèles de langage dans la résolution de problèmes hors distribution, malgré les progrès en matière de raisonnement multi-étapes.

L'analyse comparative des modèles de réflexion et de non-réflexion dans le cadre de benchmarks mathématiques révèle des schémas de performance incohérents. • Parshin Shojaee et al.

Les grands modèles de langage (LLM) ont circonscrit le plateau qu’ils avaient atteint grâce à “l’inference-time compute”, la technique à la base des modèles de raisonnement comme GPT o3 et Claude 4. Une étude récente de chercheurs d'Apple conduit à relativiser ces progrès, en montrant que même les modèles les plus récents échouent à généraliser de manière fiable au-delà des données de leur entraînement : ils interpolent, mais n’extrapolent pas.

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Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Par QANT: IA et Technologies Émergentes

Jean Rognetta

Binational franco-italien, économiste de formation, Jean devient journaliste au milieu des années 1990, après avoir fait ses premiers pas dans l’édition et la technologie. Il débute sa carrière au groupe Tests, leader de la presse informatique, puis se spécialise en financement de l’innovation et des PME. Il couvre le sujet pour Les Echos et Capital Finance de 2000 à 2015. En 2016, il rejoint le magazine Forbes et devient directeur de la rédaction de l’édition française.
Pendant la crise financière, il lance l’association PME Finance, à l’origine notamment du PEA-PME et de l’amortissement du corporate venture, ainsi que partiellement de la libéralisation du crowdfunding. Elle fusionne en 2015 avec le groupement d’entrepreneurs Croissance Plus.
Depuis 2020, Jean a lancé la revue SAY, édition française de Project Syndicate, dont il reste contributing editor, le supplément Corporate Finance du Nouvel Économiste et la collection Demain! aux Editions Hermann.

Maurice de Rambuteau

Diplômé du Centre de Formation des Journalistes (CFJ Paris) et de l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris (ESCP BS), Maurice de Rambuteau a fait ses premières armes de journaliste dans le sport, pour le site et le magazine SoFoot, puis au sein de la rédaction football de L'Equipe. Il s'est ensuite tourné vers le journalisme économique au sein de la rédaction de La Croix, avant de donner libre cours à sa passion pour la technologie en rejoignant Qant en juin 2022 pour un premier tour d’horizon de l’IA générative. Depuis, il a percé les mystères des blockchains et du métavers et, surtout, passé des dizaines de modèles d’IA au banc d’essai.

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