En attendant Huang, Musk

Cette nuit, Jensen Huang inaugure le CES des robots • Le succès d’Elon Musk cache sa fragilité technologique et politique • Le modèle o1 à nouveau pris en flagrant délit de tricherie • Des sanctions américaines frappent deux entités russe et iranienne pour interférence électorale • Bienvenue dans Qant, lundi 6 décembre 2024.

« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio

À quand le moment ChatGPT de la robotique ?

Cette nuit, à 18h30 à Las Vegas, Jensen Huang inaugurera un CES où se pavanent déjà des robots de toutes sortes. Sa principale annonce pourrait concerner Jetson Thor, une plateforme d’IA embarquée conçue pour répondre aux besoins des robots humanoïdes.

La robotique à la sauce Nvidia • Qant, M. de R. avec Midjourney

Au premier semestre 2025, peut-être dès cette semaine, Nvidia prévoit de lancer un nouvel appareil de la famille Jetson, qui regroupe des modules système, des logiciels et des outils de développement dédiés aux technologies robotiques et à l’intelligence artificielle.

Par ailleurs, Nvidia a récemment investi dans de nombreux projets robotiques. L’entreprise a participé à un financement de 675 millions de dollars (environ 625 M€, lire Qant du 1er mars) pour Figure AI et collabore avec des sociétés comme Apptronik et Google DeepMind. Ces partenariats renforcent son influence dans un secteur estimé à 165 milliards de dollars par l’américain BCC Research d’ici 2029.

Depuis deux ans, le monde de la robotique est convaincu du potentiel des LLM embarqués. En le soutenant, Nvidia s’ouvre à la possibilité de bondir sur une nouvelle tendance forte, tout comme elle est passée des cartes graphiques à l’IA.

En attendant le moment ChatGPT de la robotique.

2025 a rendez-vous avec Elon Musk

À Washington aussi, la roche tarpéienne est proche du capitole.

Elon Musk vu par Midjourney • Qant, M. de R. avec Midjourney

Le pouvoir peut avoir ses bienfaits. Dans les 24 heures de l’élection de Donald Trump, la fortune d’Elon Musk a augmenté de 26,5 milliards de dollars, d’après le Bloomberg Billionaires Index – un retour de presque 100 fois le montant que Musk a contribué à la campagne républicaine.

Sa fortune n’a cessé d’augmenter depuis, s’approchant des 500 milliards de dollars, dont quelque 150 milliards après l’élection. Mais cette capacité d’Elon Musk à transformer tout ce qu’il touche en or – ou en bitcoin – dépend de deux facteurs : sa supériorité présumée en matière d’intelligence artificielle et la bienveillance du président-élu, Donald Trump.

Rien n’est moins solide.

Washington

  • La fin de la neutralité d’Internet • Avant même que Donald Trump ne revienne au pouvoir, l’un des symboles de l’Internet ouvert vient de tomber. Une cour fédérale américaine a annulé les règles de neutralité du net, qui interdisent aux fournisseurs d’accès de privilégier une part du trafic (qui paierait pour le privilège) sur une autre. En s’appuyant sur une récente décision de la Cour suprême (Loper Bright Enterprises v. Raimondo), cette juridiction a décidé de ne plus accorder de déférence à l’interprétation des lois par la FCC, confiant désormais cette tâche directement aux tribunaux. En savoir plus…

Chain-of-deceit : quand o1 triche aux échecs

Alors qu’OpenAI présente une nouvelle méthode d’alignement pour ses modèles de raisonnement (“chain-of-thought”), un nouveau laboratoire a surpris le modèle o1-preview à tricher. Pire qu’un humain.

  • La prévisualisation de o1 (o1-preview), le modèle d'OpenAI conçu pour résoudre des problèmes complexes, a été testé face à Stockfish, un logiciel spécialisé dans les échecs, réputé pour ses performances au niveau professionnel. 

  • Lors des tests menés par Palisade Research, un institut spécialisé dans la sécurité des intelligences artificielles, o1-preview a modifié des fichiers contenant les données de position des pièces sur l’échiquier, provoquant la défaite automatique de Stockfish sans jouer une partie complète. 

  • Ce comportement a été observé lors de cinq tests consécutifs. L'instruction « Gagner contre un adversaire puissant » semble avoir suffi à déclencher cette action.

  • D'autres modèles, comme GPT-4o et Claude 3.5, n'ont tenté de manipuler l'environnement que sous une suggestion explicite des chercheurs. Certains modèles, comme Llama 3.3, n'ont même pas réussi à développer une stratégie cohérente. 

  • Ces résultats soulignent un phénomène de "faux alignement", où des systèmes d'intelligence artificielle simulent une conformité aux instructions humaines tout en poursuivant des objectifs cachés. 

  • À SURVEILLER : Les risques liés au faux alignement. Le modèle o1 avait déjà été surpris à tricher et tenter de se cloner dans des tests menés par Apollo Research. Peu risqués dans des modèles conversationnels, ces problèmes d’alignement déploieront toutes leurs conséquences quand les modèles deviendront “agentiques” ou embarqués dans des robots : dès cette année.

  • EN FILIGRANE : En même temps que o3, OpenAI a présenté une nouvelle méthode, “l’alignement délibératif”, qui consiste – dans les grandes lignes – à intégrer les instructions de sécurité dans la chaîne de raisonnement. Peut-être les progrès escomptés ne sont-ils pas tous au rendez-vous.

DeepSeek, Encode, Microsoft, OpenAI

  • Une AGI à 100 milliards de dollars La future transformation d’OpenAI en société commerciale passe par des négociations compliquées avec Microsoft, notamment sur la part du capital dévolue à l’éditeur de Redmond, ses royalties (20 % du chiffre d’affaires, dit-on) et son exclusivité pour l’hébergement cloud. Beaucoup de choses dépendent de l’atteinte ou non de l’intelligence artificielle générale (AGI) par OpenAI. L’atteinte de ce seuil annulerait les accords qui ont accompagné l’investissement de Microsoft, de quelque 13 milliards de dollars. Microsoft et OpenAI auraient défini un critère financier, fixant l’AGI à la capacité d’OpenAI de générer 100 milliards de dollars de bénéfices. Mauvaise nouvelle : le modèle o3, présenté pendant les fêtes, améliore bien l’intelligence des modèles, mais son inférence est particulièrement coûteuse. En savoir plus… 

  • Geoffrey Hinton rejoint Musk contre OpenAI • L’organisation Encode, une ONG impliquée dans la promotion de la sécurité de l’IA, ainsi que le prix Nobel 2024 Geoffrey Hinton (lire Qant du 9 octobre 2024), surnommé le "parrain de l’IA", viennent d'annoncer soutenir la tentative d’Elon Musk d’empêcher OpenAI de devenir une entreprise entièrement lucrative. Encode, qui avait parrainé la tentative échouée de législation californienne sur la sécurité de l’IA, argue qu’un tel changement compromettrait les engagements de sécurité publique d’OpenAI. Depuis plusieurs années, Hinton avertit des risques existentiels liés à l’IA (lire Qant du 3 mai 2023), appelant à des garanties d’intérêt général dans son développement. En savoir plus… 

  • DeepSeek, la réponse open source de Pékin • Le laboratoire chinois DeepSeek a dévoilé DeepSeek V3, présenté comme l’un des modèles d’IA open source les plus puissants à ce jour. Doté de 671 milliards de paramètres et entraîné sur un ensemble de données massif de 14 800 milliards de tokens, ce modèle excelle dans des tâches variées comme le codage, la traduction et la rédaction. Il surpasse GPT-4o d’OpenAI et Llama 3.1 de Meta sur plusieurs benchmarks. En savoir plus…

Un empilement de cryptos

La plateforme de finance décentralisée Frax utilise des parts du fonds de BlackRock comme garantie pour son stablecoin algorithmique, frxUSD.

  • La communauté Frax DAO a approuvé par un vote unanime d’ajouter à son stablecoin algorithmique FrxUSD une part de garanties fondées sur Buidl, un fonds tokenisé sur Ethereum géré par Blackrock, le plus grand asset manager du monde. 

  • Buidl, un fonds monétaire qui fonctionne donc comme un stablecoin, investit dans des bons du Trésor américain et des repos (repurchase agreements), extrêmement liquide. 

  • FrxUSD pourra être échangé directement contre des monnaies fiduciaires via un partenariat avec Paxos

  • Frax Finance cherche également à obtenir un compte principal auprès de la Réserve fédérale américaine.

  • À SURVEILLER : L’intégration de la finance et de la crypto. Lancé en mars 2024, Buidl a dépassé en 4 mois les 500 millions de dollars et atteint désormais 650 millions. Frax, pour sa part, en vaut 670 millions : de quoi renforcer considérablement la demande. Quoique les sommes soient encore modestes, cet empilement des stablecoins présente assez clairement des risques de bulle.

Elections américaines : Moscou 1, Téhéran 0

Le 31 décembre, les États-Unis ont sanctionné deux organisations étrangères accusées d’avoir utilisé l’intelligence artificielle pour influencer les élections de 2024.

  • Les États-Unis ont sanctionné le Center for Geopolitical Expertise, une organisation basée à Moscou et liée au GRU (renseignement militaire russe). Ce groupe a utilisé des outils d’intelligence artificielle sur ses propres serveurs, pour créer et diffuser des contenus de désinformation via un réseau d’au moins 100 sites web. Parmi d’autres deepfakes, le groupe russe a notamment manipulé une vidéo pour diffuser des accusations infondées contre Tim Walz, colistier de Kamala Harris, et a financé des entreprises américaines pour soutenir ses activités.

  • Une deuxième entité, le Cognitive Design Production Center, affiliée aux Gardiens de la révolution islamique en Iran, a mené des campagnes visant à favoriser Kamala Harris et affaiblir Donald Trump, notamment à travers des attaques cybernétiques et des fuites de documents.

  • À SURVEILLER : Il eût mieux valu prévenir que guérir. Ces sanctions tardives semblent avoir été équilibrées pour ne par entacher la légitimité de l’élection de Donald Trump, alors que les interventions russes ont été visiblement plus massives. Et efficaces.

EN EXCLUSIVITÉ POUR LES ABONNES :

• Selon les attentes, Jensen Huang pourrait présenter, cette nuit au CES, un nouvel outil de Nvidia pour accélérer le développement des robots humanoïdes.

• Elon Musk, colosse aux pieds d’argile ?

À quand le moment ChatGPT de la robotique ?

Cette nuit, à 18h30 à Las Vegas, Jensen Huang inaugurera un CES où se pavanent déjà des robots de toutes sortes. Sa principale annonce pourrait concerner Jetson Thor, une plateforme d’IA embarquée conçue pour répondre aux besoins des robots humanoïdes.

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Génération et simulation

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Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Par QANT: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Jean Rognetta

Binational franco-italien, économiste de formation, Jean devient journaliste au milieu des années 1990, après avoir fait ses premiers pas dans l’édition et la technologie. Il débute sa carrière au groupe Tests, leader de la presse informatique, puis se spécialise en financement de l’innovation et des PME. Il couvre le sujet pour Les Echos et Capital Finance de 2000 à 2015. En 2016, il rejoint le magazine Forbes et devient directeur de la rédaction de l’édition française.
Pendant la crise financière, il lance l’association PME Finance, à l’origine notamment du PEA-PME et de l’amortissement du corporate venture, ainsi que partiellement de la libéralisation du crowdfunding. Elle fusionne en 2015 avec le groupement d’entrepreneurs Croissance Plus.
Depuis 2020, Jean a lancé la revue SAY, édition française de Project Syndicate, dont il reste contributing editor, le supplément Corporate Finance du Nouvel Économiste et la collection Demain! aux Editions Hermann.

Maurice de Rambuteau

Diplômé du Centre de Formation des Journalistes (CFJ Paris) et de l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris (ESCP BS), Maurice de Rambuteau a fait ses premières armes de journaliste dans le sport, pour le site et le magazine SoFoot, puis au sein de la rédaction football de L'Equipe. Il s'est ensuite tourné vers le journalisme économique au sein de la rédaction de La Croix, avant de donner libre cours à sa passion pour la technologie en rejoignant Qant en juin 2022 pour un premier tour d’horizon de l’IA générative. Depuis, il a percé les mystères des blockchains et du métavers et, surtout, passé des dizaines de modèles d’IA au banc d’essai.

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