IA émotionnelle et IA politique

OpenAI et Google montent au créneau à Washington • Un premier modèle d’Alibaba reconnaît les expressions du visage • Comment l’IA favorise les travailleurs les plus qualifiés • Les hallucinations des modèles de recherche générative • La suprématie du recuit quantique • Ripple s’implante à Dubaï • Bienvenue dans Qant, vendredi 14 mars 2025.

« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » • Paul Virilio

Des idées pour un Plan d’Action pour l’IA

Google et OpenAI ont soumis leurs propositions pour le futur AI Action Plan de Donald Trump.

  • PRÉFÉRENCE NATIONALE • En janvier dernier, alors que le monde préparait l’AI Action Summit de Paris, Donald Trump a abrogé le décret exécutif de Joe Biden sur l’IA et lancé un appel à propositions pour un AI Action Plan national.

  • SUS AUX AUTEURS • Google et OpenAI ont tous deux soumis leurs propositions hier, cette nuit à l’heure européenne. Les deux groupes s’accordent pour demander un affaiblissement du droit d’auteur, leur donnant le droit d’entraîner leurs modèles sans restriction.

  • Pourquoi ? • OpenAI a été la première à subir des attaques en justice sur le sujet du copyright, comme par exemple celle menée par le New York Times, mais Google n’est pas en reste, par exemple sur Imagen.

  • PUCES ET PROTECTION • Alors qu’OpenAI demande, très trumpiennement, une stratégie pour “exporter l’IA démocratique” (sic) et maintenir l’avance américaine par des contrôles sur les exportations, Google tente de critiquer les restrictions existantes à l’exportation

  • Pourquoi ? • OpenAI prépare ses propres puces mais n’en produit pas encore, à la différence de Google qui a été la première à créer une alternative à Nvidia en créant les TPU avec Broadcom. En revanche, elle souffre plus directement de la concurrence de DeepSeek.

  • Comment ? • Pour combattre la non démocratique IA chinoise, OpenAI propose aussi d’augmenter les investissements dans les infrastructures (son "blueprint” de janvier) et d’accélérer l’adoption de l’IA par l’État fédéral, pour qui elle a lancé ChatGPTGov (lire Qant du 30 janvier).

  • À SURVEILLER : Elon Musk et David Sacks. Grand rival de Sam Altman, le Doge de Washington pèsera certainement, non seulement sur le choix de l’IA utilisée pour réformer les agences et administrations fédérales, mais sur toute la stratégie adoptée d’ici à l’été, et qui sera ensuite mise en œuvre par le “tsar” David Sacks, dont les relations avec OpenAI sont tout aussi tendues. OpenAI avait tout intérêt à rendre publiques ses propositions, après les avoir reformulées dans le langage politique du moment.

Alibaba dévoile une IA capable de lire les émotions

Le groupe chinois Alibaba a lancé R1-Omni, un modèle d'intelligence artificielle capable d'analyser les expressions du visage humain, à partir de vidéos.

Alibaba et les 40 émotions • Qant, M. de R. avec Midjourney

  • Le modèle R1-Omni présenté par Alibaba peut détecter les émotions humaines à partir d'analyses vidéo et décrire l’environnement ainsi que l’habillement des individus.

  • Le modèle peut interpréter les émotions humaines visibles dans les expressions faciales et les gestes, attribuant des états comme "heureux" ou "en colère".

  • Il s’appuie sur un modèle existant, HumanOmni, en optimisant ses capacités de vision par ordinateur. 

  • Alibaba propose un accès gratuit à R1-Omni sur la plateforme Hugging Face.

  • À SURVEILLER : Les cas d’usage. La maîtrise des expressions faciales et “l’empathie” – dont se targue GPT 4.5 – restent un terrain de recherche pour l’IA. Outre les déclinaisons créatives d’une intelligence artificielle émotionnelle, dans le jeu vidéo notamment et peut-être aussi le cinéma, les applications potentielles s’étendent du commerce au service client à la sécurité.

L’IA pourrait éroder la valeur du travail et augmenter les inégalités

Alors que les premières études sur l'IA suggéraient qu'elle pourrait combler les écarts de compétences professionnelles et jouer un rôle d'égalisation, des données plus récentes indiquent que les personnes les plus performantes obtiendront de nouveaux “superpouvoirs” qui leur permettront de réaliser une croissance des revenus beaucoup plus importante que les autres. Les entreprises et les travailleurs devront se préparer en conséquence.

Par Azeem Azhar et Chantal Smith (Exponential View)

Azeem Azhar (Exponential View), D. R.

“Avant l'arrivée de ChatGPT, l'orthodoxie voulait que l'IA aide au mieux les tâches de bureau routinières à faible valeur ajoutée. Or, il s'avère que cette technologie est très bien adaptée au travail stratégique et analytique. Cela soulève de grandes questions : Quels sont les travailleurs qui bénéficieront le plus de l'IA ? Quel sera l'impact de l'IA sur le travail intellectuel ? Et quel sera l'impact de la technologie sur les structures organisationnelles ?”

“Les outils d'IA agissent comme un exosquelette, permettant de faire des choses extraordinaires, mais sans développer la musculature sous-jacente.”

Madrid, Microsoft, OpenAI

  • L’Europe découvre Operator • L'agent Operator d'OpenAI, lancé fin janvier et capable d'exécuter des tâches sur le web comme réserver un restaurant ou effectuer des achats en ligne, est désormais accessible aux utilisateurs de l'abonnement ChatGPT Pro dans l'Union européenne, la Suisse, la Norvège, le Liechtenstein et l'Islande. En savoir plus…

  • L’Espagne serre la vis sur l’IA • Le Conseil des ministres espagnol a approuvé un projet de loi imposant des amendes allant de 7,5 millions à 35 millions d'euros (ou jusqu’à 7 % du chiffre d’affaires mondial) aux entreprises d’IA qui ne signalent pas clairement les contenus générés artificiellement, notamment pour limiter les deepfakes. Inspirée de l’AI Act européen, la loi interdit aussi l’usage de techniques subliminales qui manipulent les décisions des utilisateurs et l’exploitation de données biométriques à des fins discriminatoires. Elle doit encore être validée par le parlement espagnol. En savoir plus…

  • Une IA pour les gamers • Dès avril, les testeurs Xbox Insiders pourront essayer Copilot for Gaming, un assistant IA intégré à l’application mobile Xbox. Cet outil proposera des suggestions tactiques en jeu. Copilot pourra observer l’écran du joueur et fournir des indications en temps réel. Microsoft prévoit d’élargir ses fonctionnalités progressivement, mais le premier test servira à affiner l’outil avant un déploiement sur d’autres supports. En savoir plus…


Présentation de Copilot for gaming

L'IA cherche, mais cite mal : les limites des moteurs de recherche génératifs

Une étude de l’université de Columbia révèle que les moteurs de recherche basés sur l'IA peinent à citer correctement leurs sources, présentant souvent des réponses erronées avec une confiance trompeuse. Grok et Gemini remportent le bonnet d’âne.

Le robot qui cherche sur le net • Qant, M. de R. avec Midjourney

Près d'un quart des Américains déclarent qu’ils ont remplacé Google par un outil de recherche générative, généralement ChatGPT. Or, les chatbots ne redirigent pas vers les sites d'origine des informations, mais les reformulent directement dans leurs réponses en les citant en marge. Le Tow Center for Digital Journalism, un centre de recherche et développement affilié à l’université de Columbia, a évalué huit outils d'IA pour mesurer leur capacité à retrouver et citer correctement les articles de presse. L'étude conclut à des performances globalement mauvaises, avec plus de 60 % de réponses incorrectes et une tendance générale à présenter ces erreurs avec une confiance injustifiée.

Les réponses de huit outils de recherche IA à la demande d'identification de sources. • Source : TCDJ

D-Wave réclame la suprématie quantique

La société canadienne D-Wave annonce avoir franchi un cap en résolvant un problème jugé impossible pour les ordinateurs classiques, mais certains experts contestent cette avancée.

  • La canadienne D-Wave affirme avoir atteint la "suprématie quantique" en simulant les propriétés de matériaux magnétiques avec son ordinateur quantique Advantage2. Selon D-Wave, cette tâche aurait pris un million d’années à un superordinateur classique, contre seulement 20 minutes avec son système.

  • Une étude publiée dans la revue Science décrit cette avancée comme la première démonstration d’un ordinateur quantique surpassant les machines classiques sur un problème à application concrète, notamment dans la conception de nouveaux matériaux.

Comment D-Wave a atteint la suprématie quantique

  • Plusieurs chercheurs contestent ces résultats, expliquant avoir réalisé des calculs similaires en seulement deux heures sur un ordinateur portable, grâce à une technique mathématique appelée "réseaux de tenseurs".  Une autre équipe affirme avoir reproduit la simulation en trois jours avec un simple ordinateur équipé de quatre GPU. 

  • D-Wave défend la validité de son avancée, arguant que les approches concurrentes ne couvrent pas la même complexité ni la même échelle de calcul. L’entreprise insiste sur le fait que son ordinateur a utilisé jusqu’à 3 200 qubits, un niveau inaccessible aux méthodes classiques.

  • EN FILIGRANE : La cotation en Bourse. Créée en 2000, D-Wave a présenté son premier ordinateur quantique à recuit en 2011. Portée par l’enthousiasme pour le calcul quantique, elle s’est cotée à la bourse de New York (NYSE) en 2022. L’annonce tombe à pic pour soutenir une action menacée de delisting l’an dernier, pour être tombée en-dessous de 1 dollar. 

  • À SURVEILLER : Le jour de la marmotte quantique. Le 23 octobre 2019, par le biais d’une étude parue sur Nature, Google s’est targué d’avoir atteint la suprématie quantique. IBM a fortement contesté les résultats et fini par l’emporter, alors que le secteur entrait dans “l’hiver quantique” à cause des problèmes de bruit. Tôt ou tard, cependant, la suprématie quantique finira par s’établir.

Ripple prend pied dans les Émirats

Ripple devient le premier fournisseur de paiements en cryptomonnaies agréé par l'autorité financière de Dubaï, renforçant sa présence dans le Golfe.

  • Ripple a obtenu une licence de la Dubai Financial Services Authority (DFSA) pour fournir des paiements en cryptomonnaies et des services réglementés aux Émirats arabes unis.

  • L’entreprise devient le premier acteur des paiements basé sur la blockchain à être approuvé par la DFSA, lui permettant d'opérer légalement dans le Dubai International Financial Centre (DIFC).

  • Ripple renforce sa stratégie de conformité avec plus de 60 licences réglementaires mondiales, dont celles de Singapour, New York et l’Irlande.

  • EN FILIGRANE : Le paiement transfrontalier. Créée en 2013 à San Francisco sous le nom d’OpenCoin, Ripple construit des solutions de paiement international depuis 2015, assises sur sa blockchain XRP et, depuis l’an dernier, un stablecoin.

  • À SURVEILLER : La nouvelle clémence réglementaire. Ripple a toujours refusé de payer les amendes que le gendarme financier américain, la SEC, lui a imposées en août. La nouvelle équipe nommée par Donald Trump pourrait lui éviter de devoir profiter de sa licence pour s’établir aux Émirats. 

Binance, BCE, Trump

  • Donald Trump fricote avec Binance • World Liberty Financial, la société crypto de la famille Trump, a entamé des discussions avec Binance, la plus grande plateforme d’échange d’actifs numériques, pour un projet de stablecoin adossé au dollar, selon le Wall Street Journal. Bien que l’état d’avancement des négociations ne soit pas clair, des échanges ont eu lieu entre Steve Witkoff, cofondateur de World Liberty et émissaire de Trump au Moyen-Orient, et Changpeng Zhao, fondateur de Binance. En savoir plus… 

  • L’euro numérique laisse indifférents les Européens • Un sondage mené par la Banque centrale européenne auprès de 19 000 personnes dans 11 pays de la zone euro révèle un faible intérêt des consommateurs pour un euro numérique. Les Européens alloueraient une part minime de leurs actifs à l’euro numérique, préférant les moyens de paiement existants. L’étude souligne un manque de communication efficace et recommande une sensibilisation accrue, notamment via des vidéos éducatives, pour encourager l’adoption. En savoir plus…


EN EXCLUSIVITÉ POUR LES ABONNÉS :

• L’IA reformule les contenus sans créditer les sources originales, posant un problème de fiabilité.

• Les entreprises doivent choisir entre démocratiser l’IA ou créer une élite de super-utilisateurs.

L'IA cherche, mais cite mal : les limites des moteurs de recherche génératifs

Une étude de l’université Columbia révèle que les moteurs de recherche basés sur l'IA peinent à citer correctement leurs sources, présentant souvent des réponses erronées avec une confiance trompeuse. Grok et Gemini remportent le bonnet d’âne.

Les réponses de huit outils de recherche IA à la demande d'identification de sources. • Source : TCDJ

Près d'un quart des Américains déclarent qu’ils ont remplacé Google par un outil de recherche générative, généralement ChatGPT. Or, les chatbots ne redirigent pas vers les sites d'origine des informations, mais les reformulent directement dans leurs réponses en les citant en marge. Le Tow Center for Digital Journalism, un centre de recherche et développement affilié à l’université de Columbia à New York, a évalué huit outils d'IA pour mesurer leur capacité à retrouver et citer correctement les articles de presse. L'étude conclut à des performances globalement mauvaises, avec plus de 60 % de réponses incorrectes et une tendance générale à présenter ces erreurs avec une confiance injustifiée.

Une incapacité à refuser de répondre

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Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Par QANT: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Jean Rognetta

Binational franco-italien, économiste de formation, Jean devient journaliste au milieu des années 1990, après avoir fait ses premiers pas dans l’édition et la technologie. Il débute sa carrière au groupe Tests, leader de la presse informatique, puis se spécialise en financement de l’innovation et des PME. Il couvre le sujet pour Les Echos et Capital Finance de 2000 à 2015. En 2016, il rejoint le magazine Forbes et devient directeur de la rédaction de l’édition française.
Pendant la crise financière, il lance l’association PME Finance, à l’origine notamment du PEA-PME et de l’amortissement du corporate venture, ainsi que partiellement de la libéralisation du crowdfunding. Elle fusionne en 2015 avec le groupement d’entrepreneurs Croissance Plus.
Depuis 2020, Jean a lancé la revue SAY, édition française de Project Syndicate, dont il reste contributing editor, le supplément Corporate Finance du Nouvel Économiste et la collection Demain! aux Editions Hermann.

Maurice de Rambuteau

Diplômé du Centre de Formation des Journalistes (CFJ Paris) et de l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris (ESCP BS), Maurice de Rambuteau a fait ses premières armes de journaliste dans le sport, pour le site et le magazine SoFoot, puis au sein de la rédaction football de L'Equipe. Il s'est ensuite tourné vers le journalisme économique au sein de la rédaction de La Croix, avant de donner libre cours à sa passion pour la technologie en rejoignant Qant en juin 2022 pour un premier tour d’horizon de l’IA générative. Depuis, il a percé les mystères des blockchains et du métavers et, surtout, passé des dizaines de modèles d’IA au banc d’essai.

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