La Chine voit grand pour le yuan numérique • Midjourney lance un modèle de génération vidéo • OpenAI alerte sur les risques de ses modèles • Waymo veut s’implanter à New York • Combiner LLM et modèles de règles améliore la simulation de l’intelligence en essaim et multiplie les comportements émergents • Bienvenue dans Qant, vendredi 20 juin 2025.


« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio
Un nouveau système monétaire international • Qant avec GPT-4o
Le gouverneur de la Banque populaire de Chine, Pan Gongsheng, a annoncé cette semaine la création à Shanghai d’un centre international pour le yuan numérique, visant à renforcer son usage dans les paiements nationaux et internationaux.
Face au déclin du dollar orchestré par l’administration Trump, le centre veut permettre d’optimiser les transactions transfrontalières en yuan numérique (e-CNY) et de renforcer sa position dans le système financier mondial.
Pour cela, le centre s’appuiera principalement sur le système de paiement interbancaire transfrontalier chinois CIPS (Cross-Border Interbank Payment System), qui propose des règlements en 7 secondes, grâce à l’intégration de la blockchain et du yuan numérique, contre plusieurs jours pour les transactions via Swift. Six banques étrangères, notamment Standard Bank et First Abu Dhabi Bank, ont rejoint le système.
Le centre facilitera la recherche et la collaboration avec des partenaires internationaux en soutenant le développement de cadres réglementaires et en promouvant l’interopérabilité avec d’autres monnaies numériques.
Pékin souhaite voir ainsi émerger un système monétaire multipolaire, réduisant la dépendance au dollar et sa vulnérabilité face au protectionnisme américain..
EN FILIGRANE : Christine Lagarde et le moment global de l’euro. Fin mai, la présidente de la Banque Centrale Européenne avait donné un discours remarqué à Berlin, sur le “moment global de l’euro”. Elle l’a repris cette semaine, en même temps que le discours de son confrère Pan Gongsheng – une simultanéité qui, dans le monde policé des banquiers centraux, peut difficilement tenir de la coïncidence. Elle considère que l’incertitude concernant “le rôle dominant du dollar américain” et les changements dans le paysage international pourraient “ouvrir la porte à un rôle international plus important pour l’euro”. Il lui restera à rattraper le retard sur l’euro numérique, attendu pour 2027-2029, alors que le e-CNY est déjà partiellement déployé en Chine.
À SURVEILLER : Le dollar et les stablecoins. Hier, Donald Trump a exhorté la chambre des représentants à approuver sans délai ni modifications “l’incroyable” loi Genius sur les stablecoins, approuvée mardi par le sénat (lire Qant du 19 juin). À l’en croire, elle fera des États-Unis “le leader INDISCUTABLE des actifs numériques (...) du pur GÉNIE” (sic). Elle aura en tout cas pour effet d’enrichir la famille Trump, grâce au stablecoin de World Liberty Financial, et de précipiter la finance américaine vers les cryptos : un nombre croissant d’institutions qui préparent le leur, dont JP Morgan, Bank of America, Walmart, Amazon… Les crypto-optimistes considèrent que les stablecoins fourniront des fonctions de monnaie numérique au dollar et qu’ils pourront compenser l’éloignement des investisseurs institutionnels, de moins en moins friands de dette américaine et de billets verts. Tout dépendra de la vitesse de rapatriement des fonds étrangers, européens et asiatiques, menacés par la loi de programmation budgétaire, la “Big Beautiful Bill” (lire Qant du 6 juin – Vol au-dessus d’une loi de finances).
Coinbase surfe sur le Genius Act • Coinbase a conclu un accord avec la chambre de compensation Nodal Clear pour permettre l’utilisation du stablecoin USDC comme garantie (“collatéral”) dans les contrats à terme réglementés aux États-Unis. Coinbase, qui détient une participation dans l’émetteur de l’USDC, Circle, élargit aussi ses services de paiement en ligne, avec notamment l’intégration de l’USDC sur Shopify. L’action Coinbase a bondi de 17 % à la suite de ces annonces et du passage au sénat du projet de loi sur les stablecoins, le Genius Act. En savoir plus…
Midjourney vient d’adjoindre un modèle de diffusion image-to-video à son modèle de génération d’images. Le nouveau modèle, V1, permet de générer quatre vidéos de cinq secondes, sans son, à partir d’une image fixe fournie ou créée par Midjourney.
Comme pour la génération d’images, les motion prompts, les invites qui contiennent les instructions de l’utilisateur, sont interprétées par un LLM dédié, qui transforme le texte libre en instructions formatées.
Le premier modèle de diffusion avait été créé à partir de Stable Diffusion, et la firme britannique vient de lancer un modèle de génération vidéo (lire Qant du 23 novembre 2023), mais aucune indication n’a été donnée sur l’origine de V1.
Midjourney facture la génération vidéo huit fois plus cher qu’une image, arguant d’une consommation de calcul sur GPU huit fois supérieure.
EN FILIGRANE : Pendant ce temps, à Cannes… Midjourney met le pied dans un segment où les grands acteurs sont déjà clairement identifiés : Veo 3 de Google et Sora d’OpenAI réduisent progressivement l’espace de start-up pourtant bien ancrées, comme Runway ML, Pika Labs, la chinoise Kling… Par exemple, Youtube vient d’annoncer aux Lions, le festival de publicité qui vient de se conclure à Cannes, que la plateforme intégrera le modèle Veo 3 à ses Shorts. L’effet d’évangélisation pour le modèle de Google, techniquement le plus avancé du marché, devrait être à la mesure de l’audience concernée : chaque jour, les Shorts génèrent en moyenne 200 milliards de vues. Face à cette concurrence, Midjourney v1 semble plutôt pouvoir se comprendre comme une fonctionnalité de protection de l’existant, à l’instar d’Adobe Firefly. Ou comme une extension du domaine de l’image vers le GIF.
À SURVEILLER : La revanche du droit d’auteur. Le lancement intervient une semaine après une plainte déposée par Disney et Universal (lire Qant du 13 juin), accusant Midjourney d’avoir généré des visuels de personnages protégés par le droit d’auteur. Elle s’ajoute à une class action de 2023, sur les images utilisées pour l’entraînement de ces modèles. Ce laboratoire privé, qui n’a jamais levé d’argent, a échappé une première fois à un procès d’envergure, en arguant du fait qu’il n’avait fait qu’adapter Stable Diffusion (lire Qant du 23 novembre 2023). L’excuse ne tient plus et Midjourney apparaît comme le maillon faible.
Des oiseaux et des LLM • Qant avec GPT-4o
Les modèles de simulation multi-agents classiques reposent généralement sur des règles codées “en dur”. Chaque agent, qu’il s’agisse de la simulation d’une fourmi, d’un oiseau ou d’un humain, suit un ensemble de consignes préétablies pour interagir avec son environnement. Dans un article récent, Cristian Jimenez-Romero de l’université de Cergy et deux autres chercheurs européens proposent une nouvelle approche : remplacer ces règles par des invites de langage (prompts) traitées par un grand modèle comme GPT-4, afin de produire dynamiquement les comportements des agents. Les auteurs appliquent cette approche à deux systèmes emblématiques de l’intelligence en essaim : la recherche de nourriture par une colonie de fourmis et la formation de groupes cohérents dans un vol d’étourneaux.
Les agents exploitent les vastes connaissances des LLM pour influencer leurs interactions d'une manière qui n'était pas réalisable avec les systèmes traditionnels basés sur des règles. Les LLM peuvent intuitivement modéliser des dynamiques complexes qui nécessiteraient autrement de nombreuses règles explicites. Des comportements imprévus émergent ainsi naturellement des interactions des agents avec leur environnement et entre eux.
Mais pour l’instant, tout ceci n’est que simulé.
Un vol d'étourneaux dans la nature • Source : Euronews
Un Taco sur TikTok • Donald Trump a signé hier un décret présidentiel (executive order) suspendant l’interdiction de TikTok aux États-Unis pour 90 jours supplémentaires. Ce troisième report d’une loi votée, promulguée et validée par la cour suprême, semble tout aussi inconstitutionnel que les précédents et renforce l’incertitude des plateformes de distribution d’applications, l’App Store et le Google Store, qui pourraient être sanctionnées, y compris rétroactivement, si la nullité venait à être reconnue. Depuis quelques semaines, on résume à Wall Street la politique douanière de Trump d’un acronyme assassin, qui s’applique aussi bien à la tech : Taco, Trump Always Chickens Out (Trump recule toujours, effrayé comme une poule). Mais on ajoute : Until he doesn’t (jusqu’à ce qu’il ne puisse plus reculer). En savoir plus…
OpenAI met en garde contre ses futurs modèles • OpenAI a averti dans un billet de blog que ses futurs modèles d’IA atteindront un niveau de risque élevé en matière de prolifération biologique, en particulier en facilitant l’accès à des connaissances dangereuses pour des utilisateurs non spécialisés. Selon l'entreprise, ces systèmes pourraient permettre à des amateurs de reproduire des agents pathogènes connus, sans en inventer de nouveaux, ce qui nécessite des dispositifs de sécurité quasi parfaits. OpenAI explique renforcer ses protocoles de tests et prévoit un événement en juillet réunissant chercheurs publics et ONG pour anticiper ces menaces. En savoir plus…
OK Gemini, lance Search Live • Google vient de lancer Search Live, une fonctionnalité vocale de recherche basée sur Gemini. Elle n’est pour l’heure disponible qu’aux États-Unis, via l’application mobile Google. Accessible en activant le mode IA dans Labs, elle permet une conversation continue avec le moteur de recherche, via des échanges oraux générés par une version personnalisée de Gemini. L’utilisateur peut poser des questions, obtenir des réponses vocales, poser des questions de suivi sans relancer la requête, et même poursuivre la conversation tout en utilisant d’autres applications. Toute ressemblance avec ce qu’Apple avait promis pour Siri en 2024, sans réussir à le mettre en œuvre, est purement fortuite. En savoir plus…
La filiale d’Alphabet Waymo vient de déposer auprès des autorités de circulation à New York une demande de permis pour faire circuler ses robotaxis à Manhattan.
Le permis autoriserait une conduite autonome, mais un conducteur humain devra rester au volant afin de respecter la loi de l’État de New-York.
En attendant que le droit évolue, Waymo prévoit à partir du mois prochain de cartographier l’ensemble de Manhattan en mode manuel, avant d’essayer ses algorithmes dans la circulation new‑yorkaise.
L’entreprise, qui assure plus de 250 000 courses payantes par semaine dans San Francisco, Los Angeles, Phoenix et Austin, fait campagne auprès des élus pour qu’un projet de loi de l’État ouvre à terme la voie à un service sans conducteur.
Les actions de ses rivaux, Uber et Lyft, ont perdu presque 2% à l’annonce de Waymo.
À SURVEILLER : Une nécessaire déréglementation. En s'implantant à Washington, Waymo montre que les problèmes de la conduite autonome par mauvais temps sont en train de se résoudre. Ceux de la réglementation, qui empêchent le développement des robotaxis en Europe comme à New York, sont autrement coriaces.
À Austin, chi va piano va sano • Le service de robotaxis autonomes que Tesla doit lancer ce dimanche 22 juin, à Austin au Texas, mobilisera dix voitures en tout, sur des itinéraires excluant les intersections les plus dangereuses. Un groupe d’élus texans a exhorté hier Elon Musk à retarder le lancement en septembre, au moment où entrera en vigueur la nouvelle loi texane sur le transport autonome. Cela pourrait bien arranger le constructeur mais voilà, ces élus démocrates. Et puis il y a les attentes de la Bourse. En savoir plus…
Diagramme illustrant la chaîne d'outils pour les simulations multi-agents pilotées par LLM, intégrant NetLogo et GPT-4o via l'extension Python et l'API OpenAI. • Cristian Jimenez-Romero et al.
Les modèles de simulation multi-agents classiques reposent généralement sur des règles codées “en dur”. Chaque agent, qu’il s’agisse de la simulation d’une fourmi, d’un oiseau ou d’un humain, suit un ensemble de consignes préétablies pour interagir avec son environnement. Dans un article récent, Cristian Jimenez-Romero de l’université de Cergy et deux autres chercheurs européens proposent une nouvelle approche : remplacer ces règles par des invites de langage (prompts) traitées par un grand modèle comme GPT-4, afin de produire dynamiquement les comportements des agents. L’objectif est de tester si un modèle entraîné sur du langage humain peut également générer des dynamiques collectives cohérentes, lorsqu’il est intégré dans une boucle d’interaction avec un environnement simulé.
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