Musique, environnement : les fausses notes de l'IA

Pendant que les grands labels musicaux s'attaquent à Anthropic, la question de l'impact environnemental de l'IA fait enfin surface, mais Gartner, souvent prudent, rejoint les plus enthousiastes. Bienvenue dans Qant, vendredi 20 octobre 2023.

« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio

Chaque jour, les journalistes de Qant illustrent les tendances de fond qui animent la tech. Ils s’appuient sur Kessel Média et utilisent l’IA générative depuis mars 2022.

L’ÉVÉNEMENT

L’industrie musicale entre en guerre contre l’IA

Plusieurs labels musicaux dont Universal viennent de traîner Anthropic en justice, pour utilisation illicite de la musique de nombreux artistes. Pas de quoi refroidir Youtube, qui prépare un outil pour réaliser des deepfakes audio.

"Le robot prend la place du chanteur" (Qant, M. de R. avec Midjourney)"Le robot prend la place du chanteur" (Qant, M. de R. avec Midjourney)

L'industrie musicale entre dans la danse des procès contre les géants de l'IA. Universal Music Group (UMG) vient en effet d'intenter une action en justice contre Anthropic, affirmant que l'entreprise a utilisé illégalement sa musique pour entraîner des modèles d'IA, en introduisant sans autorisation les chansons des artistes qu'il représente dans ses jeux de données. Cela marque la première grande action en justice de l'industrie de la musique contre un développeur d'IA. UMG réclame 75 millions de dollars de dommages et intérêts, aux côtés d'autres labels de moindre importance, comme Concord Music Group, ABKCO et Worship Together Music. Parmi les artistes “pillés”, Katy Perry, les Rolling Stones ou encore Beyoncé. Cette action en justice, qui est la première d'une maison de disques contre une entreprise d'IA concernant l'utilisation de paroles de chansons, intervient après que l'Authors Guild ait poursuivi OpenAI le mois dernier pour des raisons similaires d'infraction au droit d'auteur (lire Qant du 21 septembre).

Dans l’audio, chacun son outil

La musique générée par l'IA se situe actuellement dans une zone juridique floue, mais cela n'a pas découragé l'intérêt pour son développement : Meta (lire Qant du 13 juin), Google (lire Qant du 30 janvier) et Stability AI (lire Qant du 20 décembre 2022) ont tous lancé des outils de création musicale ces derniers mois. YouTube travaille d’après Bloomberg sur un outil basé sur l'intelligence artificielle permettant aux utilisateurs de reproduire la voix de musiciens célèbres lors de l'enregistrement audio.

Le géant du streaming vidéo a sollicité les maisons de disques pour obtenir les droits d'utiliser leurs chansons pour entraîner ce nouvel outil d'IA mais aucun accord n'a encore été signé avec un grand label. Le mois dernier, YouTube a tout de même dévoilé plusieurs nouveaux outils alimentés par l'IA pour ses créateurs, dont des arrière-plans photo et vidéo générés par l'IA et des suggestions de sujets vidéo (lire Qant du 25 septembre).

La question des droits d'auteur face à la montée des morceaux générés par l'IA a été mise en lumière lorsqu'une chanson de rappeurs Drake et The Weeknd générée par l'IA sans leur consentement est devenue virale. Quelques artistes, comme Grimes, ont adopté la musique générée par l'IA, mais la plupart, de Sting à Selena Gomez, ont réclamé que la réglementation protège leur voix contre la reproduction non autorisée.

Parallèlement à cette action en justice, Universal Music vient de signer un accord avec Bandlab Technologies, un développeur d'IA basé à Singapour qui anime un réseau social éponyme centré sur la création musicale. Leur collaboration vise à favoriser l'utilisation éthique de l'IA tout en protégeant les droits des artistes et des auteurs-compositeurs.

Et des labels.

Pour en savoir plus :

L’ESSENTIEL : Adobe, Amazon, Clearview, DCG, DTCC, Gartner, Gemini, Genesis, Meta, OpenAI

ROBOTS

I, robot-magasinier (suite) : Toujours plus de robots dans les entrepôts d’Amazon

Amazon vient de présenter Sequoia, un nouveau système de traitement des stocks, capable d’accélérer la réalisation des livraisons de 25%. Le marchand teste aussi les robots humanoïdes d’Agility Robotics.

Pendant que Figure AI lançait son robot-magasinier, Amazon prenait en test le robot humanoïde Digit d'Agility Robotics, capable lui aussi de manipuler des articles dans les entrepôts (lire Qant du 19 octobre et du 20 septembre). Mais son nouveau système de traitement des stocks, nommé Sequoia, va bien au-delà de l’introduction d’émules de C3PO, le robot humanoïde de la Guerre des Étoiles de George Lucas. Lancé cette semaine à Houston, il devrait accélérer la préparation des livraisons de 25%, alors que le service de livraison par drone Prime Air s’étoffe progressivement.

Pour cela, Amazon introduit trois sortes de nouveaux robots dans ses centres de traitement : des robots autonomes mobiles, des bras robotiques et de nouvelles machines de tri. Dotés d’IA, Proteus et Hercules peuvent déplacer des étagères, distribuer des conteneurs et livrer des produits dans le bâtiment. Le bras robotique Sparrow peut lui identifier des produits à l'intérieur des bacs et les en sortir. Enfin, une nouvelle machine de tri et de mise en bac a été conçue pour améliorer l'ergonomie de travail, réduisant ainsi les risques de blessures pour les employés. D’après l’AFP, Amazon utilise déjà quelque 750 000 robots dans ses entrepôts.

Ah, et il y a aussi C3PO. Pardon, Digit.

Pour en savoir plus : Wall Street Journal ; La Croix/AFP

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

  • Gartner s’emballe : Souvent sceptique et toujours prudent (sur le métavers, tout récemment) le cabinet américain Gartner estime que d'ici à 2025, l’IA sera un partenaire de travail pour 90 % des entreprises et organisations dans le monde. D'ici à 2028, 15 milliards de produits connectés auront le potentiel de se comporter comme des clients autonomes. A l’en croire, l'IA générative transformera complètement les processus, la prise de décision et la stratégie des entreprises. Elle relève de la stratégie et de l’organisation, et non du numérique ou du système d’information.
    Pour en savoir plus: Venture Beat

  • Le rappeur contre l’IA de son avocat… : Le chanteur du groupe américain des Fugees, Prakazrel “Pras” Michel, affirme que l'utilisation d'un programme d'intelligence artificielle "expérimental" par son avocat a contribué à sa condamnation et demande un nouveau procès. L'avocat, David Kenner, aurait utilisé l’IA pour aider à rédiger les plaidoiries de clôture, mais Prakazrel Michel et ses nouveaux avocats estiment que cela a nui à sa défense, pointant notamment une confusion concernant des paroles de chanson attribuées à tort aux Fugees.
    Pour en savoir plus: Associated Press

  • … Des écrivains contre Meta, Microsoft et Bloomberg : Un groupe d'auteurs, dont l'ancien gouverneur de l'Arkansas Mike Huckabee, a porté plainte à New-York contre Meta, Microsoft et Bloomberg, les accusant d'avoir utilisé leurs œuvres pour former des systèmes d'intelligence artificielle sans autorisation. La plainte se concentre sur l'utilisation controversée de l'ensemble de données "Books3", qui contiendrait des milliers de livres piratés.
    Pour en savoir plus: Reuters

  • OpenAI s’exporte dans le Golfe : OpenAI vient de s'associer au groupe émirati G42, pour développer les capacités de l'IA dans la région du Moyen-Orient. L'objectif annoncé du partenariat est d'utiliser l'IA d'OpenAI dans les domaines d'expertise de G42 tels que les services financiers, l'énergie, la santé et les services publics.
    Pour en savoir plus: The Information

  • Encore plus d’IA dans les logiciels d’Adobe : Adobe vient de lancer les nouvelles versions de Photoshop et Premiere, intégrant de nombreuses fonctionnalités basées sur l'intelligence artificielle grâce à sa nouvelle plateforme Sensei AI. Dans Photoshop, un nouvel outil permet de sélectionner et remplacer automatiquement des objets ou des arrière-plans, et d'autres outils offrent des effets artistiques ou l'amélioration de la qualité des images. Pour Premiere, l'IA est utilisée pour créer automatiquement des montages vidéo à partir des séquences fournies.
    Pour en savoir plus: Engadget

  • Pas de condamnation pour Clearview AI : Un tribunal britannique a statué que la très controversée Clearview AI, une entreprise américaine spécialisée dans la reconnaissance faciale, n'aura pas à payer une amende de 7,5 millions de livres (9 millions de dollars) pour atteinte à la vie privée. Le tribunal a déterminé que l'Information Commissioner's Office (ICO), le régulateur des données du Royaume-Uni, n'avait pas l'autorité pour sanctionner ClearView, car ses opérations se situent hors de la portée territoriale des réglementations britanniques.
    Pour en savoir plus: New-York Times

BLOCKCHAINS

  • Nouvelle mise à jour pour Circle : Circle, émetteur du stablecoin USDC, a lancé une mise à jour de son portefeuille crypto Web3 permettant aux commerçants de payer les frais de transaction de leurs clients. La super-app sud-asiatique Grab teste actuellement cette fonction, nommée Gas Station, en offrant à ses utilisateurs singapouriens la possibilité d'utiliser des bons NFT sans frais de transaction.
    Pour en savoir plus: CoinDesk

  • DTCC s’offre Securrency : L'entreprise américaine de services financiers DTCC a conclu un accord pour acheter Securrency, dans le cadre d'une initiative visant à "libérer la puissance de la DeFi institutionnelle". Le sens en sera éclairci quand, une fois l’acquisition finalisée, Securrency deviendra DTCC Digital Assets avec Nadine Chakar, PDG de Securrency, à sa tête.
    Pour en savoir plus: Bloomberg

  • Gemini, Genesis et DCG attaqués pour fraude : L'avocate générale de New-York, Letitia James, poursuit trois entreprises de cryptomonnaie: Gemini, Genesis et Digital Currency Group (DCG). Elle les accuse d’avoir induit en erreur les investisseurs, entraînant une perte de plus de 1 milliard de dollars, et veut interdire à ces entreprises d'opérer dans l'industrie financière, en obtenant des dommages-intérêts. La plainte cible notamment le programme Gemini Earn, où Gemini aurait trompé ses clients sur le risque réel.
    Pour en savoir plus: New-York Times

AR-VR-XR

  • Le Meta Quest 3 à l’épreuve des réseaux sociaux : Les fonctionnalités de réalité mixte du nouveau casque de Meta commencent à nourrir les réseaux concurrents de son fabricant. Un utilisateur de X, @CixLiv, a partagé sur l’ancien Twitter une vidéo où il passe commande dans un café en portant un casque Quest3. Une vidéo sur TikTok montre @Kukurio59 qui cuisine en l’utilisant pour regarder un film. D’autres critiques pointent ses imperfections. Le début de la gloire.
    Pour en savoir plus: Business Insider

EXPERT

La difficile mesure de l’impact environnemental de l’IA

Plusieurs études tentent de mesurer les émissions causées par les modèles d’intelligence artificielle. Une entreprise qui reste pour le moment difficile à réaliser.

"Le robot face à ses dégats" (Qant, M. de R. avec Midjourney)"Le robot face à ses dégats" (Qant, M. de R. avec Midjourney)

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Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Par QANT: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Jean Rognetta

Binational franco-italien, économiste de formation, Jean devient journaliste au milieu des années 1990, après avoir fait ses premiers pas dans l’édition et la technologie. Il débute sa carrière au groupe Tests, leader de la presse informatique, puis se spécialise en financement de l’innovation et des PME. Il couvre le sujet pour Les Echos et Capital Finance de 2000 à 2015. En 2016, il rejoint le magazine Forbes et devient directeur de la rédaction de l’édition française.
Pendant la crise financière, il lance l’association PME Finance, à l’origine notamment du PEA-PME et de l’amortissement du corporate venture, ainsi que partiellement de la libéralisation du crowdfunding. Elle fusionne en 2015 avec le groupement d’entrepreneurs Croissance Plus.
Depuis 2020, Jean a lancé la revue SAY, édition française de Project Syndicate, dont il reste contributing editor, le supplément Corporate Finance du Nouvel Économiste et la collection Demain! aux Editions Hermann.

Maurice de Rambuteau

Diplômé du Centre de Formation des Journalistes (CFJ Paris) et de l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris (ESCP BS), Maurice de Rambuteau a fait ses premières armes de journaliste dans le sport, pour le site et le magazine SoFoot, puis au sein de la rédaction football de L'Equipe. Il s'est ensuite tourné vers le journalisme économique au sein de la rédaction de La Croix, avant de donner libre cours à sa passion pour la technologie en rejoignant Qant en juin 2022 pour un premier tour d’horizon de l’IA générative. Depuis, il a percé les mystères des blockchains et du métavers et, surtout, passé des dizaines de modèles d’IA au banc d’essai.

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