La bulle IA s'empare de l'intelligence artificielle générale, avenir toujours plausible sinon proche, Nature interroge les chercheurs sur l'impact de l'IA et Meta donne un fusil à Mickey. Bienvenue dans Qant, vendredi 6 octobre 2023.
« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio
Chaque jour, les journalistes de Qant illustrent les tendances de fond qui animent la tech. Ils s’appuient sur Kessel Média et utilisent l’IA générative depuis mars 2022.
"L'intelligence artificielle atteint la toute puissance" (Qant, M. de R. avec Midjourney)
Jamais en retard d’une bulle, le plus important investisseur tech du monde, le japonais SoftBank, a pivoté fin juin, en misant tout sur la vague de l’IA. '“Je veux que Softbank soit à la tête de la révolution de l’IA”, déclarait alors son fondateur Masayoshi Son. Avant-hier à Tokyo, il a doublé la mise. Ou plutôt décuplée : il estime que l'intelligence artificielle générale (AGI) sera atteinte en une décennie et qu’elle sera dix fois plus intelligente que toute l'intelligence humaine combinée. Cela ne manquera pas d’avoir un impact majeur sur toute l’économie, de l’industrie à la finance. En attendant, l'utilisation de l'IA par les employés de Sobank lui aurait déjà permis de déposer 10 000 brevets : un troisième chiffre 10 sans doute plus impressionnant que les deux autres, peut-être un peu optimistes.
Masayoshi Son fait écho à John Carmack, qui annonçait quelques jours plus tôt que sa start-up, Keen Technologies, compte créer avant 2030 un "prototype d'IA montrant des signes de vie". Carmack, connu pour avoir créé en 1993 le jeu de tir en vue subjective Doom (premier succès mondial du genre), vient de s’associer au canadien Richard Sutton, considéré l’un des pères de l’apprentissage par renforcement en IA. Keen Technologies avait levé 20 millions de dollars en septembre 2022, bien avant que Masayoshi Son ne succombe à l’engouement pour l’IA.
Précisément grâce au reinforcement learning, l’IA surpasse déjà de loin l’intelligence humaine dans des jeux ou d’autres domaines intellectuels formalisés, qu’il s’agisse de calculer le repliement des molécules (AlphaFold, 2020) ou de jouer aux échecs (Deep Blue, 1997). Au moment du lancement de GPT-4 en mars dernier (lire Qant du 15 mars et du 23 mai), des chercheurs de Microsoft ont décelé dans le modèle une capacité embryonnaire à reproduire les capacités cognitives humaines et résoudre des tâches inconnues, en gardant la mémoire de ses apprentissages : des “étincelles” d’intelligence artificielle générale.
Grosso modo, la recherche sur l’AGI s’est séparée jusqu’à présent en deux branches distinctes. L’approche “machine-centric” tente de simuler la structure cérébrale humaine pour en reproduire le comportement, tandis que l'approche “human-centric” utilise des processeurs neuromorphiques et étudie les mécanismes cérébraux pour comprendre et simuler le fonctionnement cognitif. Une étude publiée fin septembre par des chercheurs américains et taïwanais pourrait bien changer la donne.
Yuhong Zhang de l’université Brown et ses collègues proposent une approche interdisciplinaire qui tente d'intégrer les grands modèles de langage (LLM) comme GPT avec des techniques d'interface cerveau-ordinateur (BCI) basées sur l'électro-encéphalogramme (EEG). Cette intégration de méthodes issues des neurosciences et de l'IA a permis de classer les états mentaux des individus lors de la lecture de mots, avec une précision d’environ 60%. Outre que cela est prometteur pour le développement de technologies d'assistance à la lecture utilisant l'IA, cela pourrait poser les bases de systèmes dotés d’une meilleure compréhension de la cognition et la perception humaines. Et donc, à terme, conduire à des IA avec des capacités plus humaines : des AGI.
Derrière la crainte d’une IA surpuissante ce cache celle d’une IA consciente et donc d’autant plus autonome. Au mois d’août dernier, un groupe de scientifiques anglais et américains a ainsi interrogé la possible conscience des systèmes d’IA actuels (lire Qant du 29 septembre). Leur conclusion : si aucun de ces derniers ne peut être considéré comme conscient à l’heure actuelle, il n’existe aucune barrière technique qui empêche que cela ne devienne une réalité dans le futur.
D’ici là cependant, de nombreux spéculateurs auront eu le temps de s’enflammer, puis se désespérer.
Pour en savoir plus :
Un article récemment publié dans Nature Communications présente des robots développés par une équipe de l'Université d'État du Colorado. Ces derniers, qui imitent les amphibiens, peuvent nager, marcher et ramper en fonction des obstacles de leur environnement. Ils utilisent pour cela des muscles artificiels légers qui n'exigent pas de sources d'énergie embarquées lourdes. Conçus depuis 2017 par une équipe dirigée par le professeur Jianguo Zhao du département de génie mécanique de la CSU, ces systèmes utilisent des matériaux dont la rigidité varie selon la température. Ces robots peuvent ajuster leurs membres pour nager, les courber pour franchir des obstacles ou même sauter sur la terre ferme. Une version peut même se faufiler à travers de petites ouvertures.
Les chercheurs comparent le mouvement de ces robots à la transformation des grenouilles, qui commencent leur vie comme des têtards nageant avant de développer des jambes leur permettant de sauter, ramper ou nager. Pour l'instant, ils sont télécommandés, mais des versions futures pourraient s'adapter automatiquement à leur environnement grâce à des capteurs et des caméras.
Pour en savoir plus : Nature
Stable Diffusion illustre les articles d’Artifact : Artifact, un agrégateur d'actualités développé par les co-fondateurs d'Instagram, a introduit une nouvelle fonctionnalité d'IA générative permettant aux utilisateurs de créer leurs propres images pour accompagner leurs publications. Avec cette nouvelle fonction, les utilisateurs peuvent générer des images, comme des paysages pour des articles sur le climat ou des voitures conceptuelles pour des discussions sur les véhicules électriques. La fonction utilise un modèle Stable Diffusion pour la génération d'images.
Pour en savoir plus: Tech Crunch
Mickey fait déraper l’IA de Meta : Moins d'une semaine après que Meta ait dévoilé des "stickers" générés par IA dans son application Messenger, des utilisateurs ont créé et partagé des images potentiellement offensantes de personnages protégés par des droits d'auteur sur les réseaux sociaux. En particulier, l’artiste canadien Pier-Olivier Desbiens a posté une série d'autocollants virtuels qui sont devenus viraux, montrant des combinaisons telles que Mickey Mouse avec un fusil ou Elmo de Sesame Street brandissant un couteau.
Pour en savoir plus: Ars Technica
L’Assistant chante avec Bard : Après les extensions qui intègrent Bard à ses différents produits (lire Qant du 20 septembre), Google vient de présenter “Assistant with Bard”, qui peut aider à planifier des voyages, rechercher des détails dans les emails, créer une liste de courses et générer des légendes pour les photos. Intégrant des applications existantes comme Gmail et Docs, Assistant with Bard sera d'abord disponible pour des testeurs avant son déploiement sur Android et iOS.
Pour en savoir plus: Washington Post
Yasa-1, un assistant multimodal pour concurrencer ChatGPT : Reka, une startup d'IA fondée par des chercheurs de DeepMind, Google, Baidu et Meta, a lancé Yasa-1, un assistant IA multimodal capable de comprendre les textes, images, vidéos courtes et extraits audio. Conçu comme un concurrent direct de ChatGPT, Yasa-1 peut être personnalisé pour diverses utilisations, supporte 20 langues et offre des réponses contextuelles depuis Internet, tout en traitant de longs documents et en exécutant du code.
Pour en savoir plus: Venture Beat
L’IA et les 50 nuances de peau : Une étude publiée par des chercheurs de Sony AI suggère que les tests actuels sur les biais de l'IA liés à la couleur de la peau se concentrent principalement sur la clarté ou l'obscurité du teint, négligeant les nuances de rouge et de jaune. Les chercheurs ont plaidé pour une mesure "multidimensionnelle" de la couleur de la peau, espérant ainsi aboutir à des systèmes d'IA plus diversifiés et représentatifs. La recherche de Sony indique cependant que ces échelles ne prennent pas en compte les biais contre certains groupes ethniques qui ne se situent pas strictement sur le spectre clair-foncé.
Pour en savoir plus: The Verge
Un petit Titan à Hong-Kong : La société de capital-risque CMCC Global, basée à Hong Kong et axée sur la crypto, vient de lever 100 millions de dollars pour soutenir les startups blockchain asiatiques avec un fonds nommé Titan Fund, selon les informations du South China Morning Post. Le fonds se concentrera sur les investissements dans l'infrastructure blockchain, les applications grand public comme les jeux et les NFT, ainsi que les services financiers.
Pour en savoir plus: Coin Telegraph
La réalité augmentée dans le casque … de football : L'université Gallaudet à Washington a collaboré avec AT&T pour créer le premier casque de football américain de réalité augmentée connecté en 5G destiné aux étudiants-athlètes sourds et malentendants qui utilisent la langue des signes américaine sur le terrain. Ce casque permet aux entraîneurs d'envoyer des jeux directement sur de petits écrans dans la visière des joueurs, rendant le jeu plus inclusif pour ces athlètes.
Pour en savoir plus: Washington Post
Un deuxième ordinateur quantique pour le Japon : L'entreprise japonaise Fujitsu et l'institut de recherche Riken ont annoncé le développement réussi du deuxième ordinateur quantique du Japon. Ce système de 64 qubits sera intégré à un simulateur d'ordinateur quantique de 40 qubits pour améliorer sa précision.
Pour en savoir plus: Reuters
L'intelligence artificielle (IA) est déjà en train de transformer profondément le monde scientifique. Selon une enquête récente menée par Nature, plus de la moitié des 1600 chercheurs interrogés estiment que l'IA devient "très importante" ou "essentielle" pour leurs domaines de recherche. Ce qui n'est pas sans susciter leurs inquiétudes.
La diffusion croissante de l'IA générative dans la recherche Source : Nature
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