La course aux agents s'accélère

Trump mobilise et les agents d’IA se multiplient • Meta investit dans les datacenters tout en retravaillant ses algorithmes et ses modèles • La SEC de Trump libère les cryptos dans les banques • L’IA dans les labos change le métier des chercheurs • Les écueils qui menacent l’IA • Bienvenue dans Qant, lundi 27 janvier 2025.

« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio

Un plan d’action pour asseoir la domination américaine sur l’IA

Alors que les Américains s’alarment de la puissance de l’IA chinoise, Donald Trump donne six mois à ses équipes pour présenter un plan d’action sur l’IA.

Une stratégie américaine pour l’IA • Qant, M. de R. avec Midjourney

  • En fin de semaine dernière, Donald Trump a signé un deuxième décret présidentiel (“executive order”) sur l’intelligence artificielle, après avoir supprimé dès lundi celui, fondateur, de Joe Biden (lire Qant du 31 octobre 2023).

  • Reprenant les arguments d’Elon Musk en faveur de son propre modèle, Grok, contre ceux d’OpenAI, Anthropic et Meta, le décret veut imposer des systèmes d'IA "sans parti pris idéologique ni programme social prédéterminé".

  • Il confie à un triumvirat dont, notamment, le “tsar IA et Crypto” David Sacks, le soin de formuler dans les six mois une stratégie pour “maintenir et renforcer la position dominante de l'Amérique dans l'IA”.

  • Une révision de toutes les décisions prises en exécution du décret de Joe Biden, notamment les achats, est lancée immédiatement.

  • À SURVEILLER : DeepSeek. Le lancement la semaine dernière de DeepSeek R1, un modèle chinois open source comparable au modèle o3 d’OpenAI (qui n’est pas encore sorti), a provoqué un mouvement de panique dans les milieux américains de l’IA. Le décret entend donc mobiliser – tout en n’oubliant pas d’enrichir les alliés de Donald Trump.

Meta

  • Meta entre dans la course aux datacenters • Les investissements de Meta, principalement consacrés à l’IA et aux centres de données, devraient bondir de 70 % cette année et s’approcher des 65 milliards de dollars, a annoncé Mark Zuckerberg vendredi dernier. En 2024, avec presque 40 milliards, le groupe a ouvert 6 nouveaux datacenters. Microsoft, pour sa part, déploie 80 milliards dans son exercice clos le 30 juin prochain. S’émancipant de sa tutelle, OpenAI a présenté à la Maison Blanche la semaine dernière le programme Stargate, initialement doté de 100 milliards de dollars. En savoir plus… 

Derrière Operator, la ruée des agents IA

A la suite d'OpenAI, Perplexity et JetBrains lancent des agents IA aux fonctionnalités avancées, visant à simplifier des tâches complexes et à renforcer l'efficacité des utilisateurs.

  • La start-up de recherche générative Perplexity vient de lancer Perplexity Assistant, un agent d’IA disponible en 15 langues, exclusivement sur Android.

  • Conçu pour concurrencer sur le smartphone l’assistant Google, fondé sur Gemini, l’agent de Perplexity combine recherche sur Internet, raisonnement et actions multi-applications. Il conserve le contexte d’une action à l’autre.

  • Perplexity Assistant pourra donc, par exemple, réserver un restaurant, noter un rendez-vous dans le calendrier, ou utiliser la caméra du téléphone pour répondre à des questions basées sur l’environnement (traduire un panneau, etc.). 

  • EN FILIGRANE : Pas de concurrence pour Siri. Les développeurs tiers sur iOS n’ont pas accès aux permissions système qui pourraient permettre à Perplexity de porter son agent sur iPhone. Le jeu de la concurrence ne déploiera donc ses effets que dans l’environnement Android.

La présentation de l’agent Junie par JetBrains

  • Simultanément ou presque, la tchèque JetBrains, spécialiste des outils de développement logiciel et créatrice du langage Kotlin, a ouvert en accès réservé Junie, un agent IA intégré à ses environnements de développement comme IntelliJ IDEA et PyCharm. 

  • Junie automatise des tâches courantes de programmation et améliore la qualité du code en générant, testant et vérifiant les solutions proposées.

  • À SURVEILLER : L’agent Smith. Satya Nadella a déclaré le mois dernier que les agents d’IA avaient pour vocation de remplacer les applications. Après les pionniers de 2024, comme le Rabbit de R1, Computer Use de Claude et les agents CRM de Salesforce et Microsoft, d’innombrables agents créés par toute la Silicon Valley vont déferler sur le monde dans les prochaines semaines. Comme l’agent Smith dans Matrix.

Les trois écueils dont l'IA doit se garder

Alors que l'intelligence artificielle a le potentiel de stimuler la croissance mondiale et d'accroître la productivité, le secteur doit se mesurer à trois défis : la montée en flèche des coûts de développement et des besoins énergétiques, la rentabilité des investissements qu’on lui consent et le manque de données de qualité.

Par Dambisa Moyo (économiste)

Dambisa Moyo, D. R.

“Les revenus annuels de l'ensemble du secteur de l’IA ne s'élèvent qu'à 12 milliards de dollars, dont 4 milliards pour la seule OpenAI.”

« Gartner prévoit que d'ici 2027, 40 % des centres de données existants seront “ limités sur le plan opérationnel” en raison d'une disponibilité limitée de l'énergie.»

Qant est membre de Project Syndicate.

Hugging Face, Meta

  • Llama coquin, Meta dans l’embarras • Meta a déclenché vendredi une procédure d'urgence baptisée SEV (pour “site event”) après que plusieurs utilisateurs, dont un journaliste de Reuters, du chatbot Meta AI ont signalé que celui-ci considérait que Joe Biden était encore président des États-Unis. Deux autres SEV ont été déclenchées par des difficultés rencontrées par certains utilisateurs à cesser de suivre les comptes de Donald Trump et de Melania Trump sur Facebook et Instagram, ou à rechercher “Democrat” sur Instagram. Après la volte-face politique de Mark Zuckerberg, le rééquilibrage des algorithmes de Meta ne semble donc pas avoir été de tout repos. En savoir plus… 

  • Hugging Face voit petit pour ses modèles • Hugging Face vient de lancer SmolVLM-256M et SmolVLM-500M, deux modèles d'IA multimodaux parmi les plus petits du marché avec respectivement, comme leurs noms l’indiquent, 256 millions et 500 millions de paramètres. Ils sont conçus pour analyser images, vidéos courtes et textes sur des appareils limités, comme des ordinateurs portables avec moins de 1 Go de RAM. Disponibles sous licence Apache 2.0, ils surpassent des modèles beaucoup plus importants sur certains étalonnages, tout en offrant une solution économique pour traiter de grandes quantités de données. En savoir plus…

La SEC de Trump pose ses premiers actes

Déjà remanié par Trump, le gendarme financier américain a annulé vendredi une directive imposant aux entreprises financières de traiter les cryptoactifs détenus pour leurs clients comme des passifs comptables.

  • La règle SAB 121 de la Securities and Exchange Commission (SEC), publiée en mars 2022, obligeait les institutions financières à enregistrer les actifs numériques détenus pour leurs clients comme des passifs dans leurs bilans.

  • Cette mesure a été violemment critiquée par les acteurs cryptos, qui estiment qu'elle rendait la garde de ces actifs plus complexe et créait des risques de concentration au profit d'entités non bancaires.

  • La nouvelle directive abroge cette règle et encourage les entreprises à suivre les normes du Financial Accounting Standards Board ou les directives internationales existantes.

  • À SURVEILLER : Les fuites qui deviennent réalité. Cette mesure était attendue dès l’investiture de Trump, par décret présidentiel (executive order). “L’industrie” crypto attend encore une norme contre la “débancarisation”, qui forcerait les banques à ouvrir ou maintenir les comptes des start-up crypto.

L’IA dans la recherche menace les jeunes chercheurs

Une étude du MIT explore comment l'introduction de l'intelligence artificielle dans un laboratoire de recherche peut augmenter les brevets déposés tout en remodelant les rôles des chercheurs.

L’IA s’improvise chercheur • Qant, M. de R. avec Midjourney

Aidan Toner-Rodgers, doctorant en économie au MIT, vient de publier une étude intitulée Artificial Intelligence, Scientific Discovery and Product Innovation, qui met en lumière les effets de l’introduction de l’IA dans le laboratoire de recherche et développement d’une grande entreprise américaine. Les résultats sont parlants. Les chercheurs qui utilisent l’IA ont découvert 44 % de matériaux de plus que leurs collègues non équipés, avec une augmentation de 39 % des dépôts de brevet et à une hausse de 17 % des prototypes produits.

57 % des activités de génération d’idées ont été automatisées, libérant ainsi les chercheurs pour se concentrer sur l’évaluation des propositions générées par l’IA. Résultat : 82 % des chercheurs ont exprimé une baisse de satisfaction professionnelle, citant une perte de créativité et un sentiment d’inutilisation de leurs compétences.

Répartition des compétences entre la génération d’idées et l’analyse des idées générées par IA • Source : Aidan Toner-Rodgers, MIT

EN EXCLUSIVITÉ POUR LES ABONNES :

• Pour tenir ses promesses, l’IA doit encore surmonter de nombreux obstacles financiers, énergétiques et techniques.

• Une étude du MIT montre l’augmentation de la productivité dans la R&D grâce à l’IA – et ses conséquences négatives sur les chercheurs.

Les trois écueils dont l'IA doit se garder

Alors que l'intelligence artificielle a le potentiel de stimuler la croissance mondiale et d'accroître la productivité, le secteur doit se mesurer à trois défis : la montée en flèche des coûts de développement et des besoins énergétiques, la rentabilité des investissements qu’on lui consent et le manque de données de qualité.

Par Dambisa Moyo (économiste)

Dambisa Moyo lors du débat sur l’IA à la Chambre des Lords du Royaume-Uni, en mars 2024

Le rythme rapide des avancées technologiques au cours de l'année écoulée, en particulier dans le domaine de l'intelligence artificielle, a fourni de nombreuses raisons d'être optimiste. Mais à l'approche de 2025, certains signes indiquent que l'élan de l'intelligence artificielle pourrait s'essouffler.

Des motifs d’espoir

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Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

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Jean Rognetta

Binational franco-italien, économiste de formation, Jean devient journaliste au milieu des années 1990, après avoir fait ses premiers pas dans l’édition et la technologie. Il débute sa carrière au groupe Tests, leader de la presse informatique, puis se spécialise en financement de l’innovation et des PME. Il couvre le sujet pour Les Echos et Capital Finance de 2000 à 2015. En 2016, il rejoint le magazine Forbes et devient directeur de la rédaction de l’édition française.
Pendant la crise financière, il lance l’association PME Finance, à l’origine notamment du PEA-PME et de l’amortissement du corporate venture, ainsi que partiellement de la libéralisation du crowdfunding. Elle fusionne en 2015 avec le groupement d’entrepreneurs Croissance Plus.
Depuis 2020, Jean a lancé la revue SAY, édition française de Project Syndicate, dont il reste contributing editor, le supplément Corporate Finance du Nouvel Économiste et la collection Demain! aux Editions Hermann.

Maurice de Rambuteau

Diplômé du Centre de Formation des Journalistes (CFJ Paris) et de l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris (ESCP BS), Maurice de Rambuteau a fait ses premières armes de journaliste dans le sport, pour le site et le magazine SoFoot, puis au sein de la rédaction football de L'Equipe. Il s'est ensuite tourné vers le journalisme économique au sein de la rédaction de La Croix, avant de donner libre cours à sa passion pour la technologie en rejoignant Qant en juin 2022 pour un premier tour d’horizon de l’IA générative. Depuis, il a percé les mystères des blockchains et du métavers et, surtout, passé des dizaines de modèles d’IA au banc d’essai.

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