Qant: Révolution cognitive et Avenir du numérique

Chaque jour, les tendances de la tech et l'IA par Jean Rognetta et Maurice de Rambuteau

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Par QANT: Révolution cognitive et Avenir du numérique
6 déc. · 8 mn à lire
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L'IA entre au lycée

Google dévoile Gemini très prudemment • L'Éducation Nationale lance un pilote d'IA • Meta et IBM forment une alliance pour l'IA open source • Un robot pourra peut-être nettoyer les océans • La SG émet un green bond sur Ethereum • Bienvenue dans Qant, qui revient sur la gouvernance d'OpenAI avec Katharina Pistor, ce mercredi 6 décembre 2023.

« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio

Chaque jour, les journalistes de Qant illustrent les tendances de fond qui animent la tech. Ils s’appuient sur Kessel Média et utilisent l’IA générative depuis mars 2022.

DERNIÈRE MINUTE

Gemini prépare sa sortie

Les nouveaux LLMs de Google devraient être présentés cette semaine, alors que leur sortie est repoussée à l’an prochain.

"Sundar Pichai se dévoile" (Qant, M. de R. avec Midjourney)"Sundar Pichai se dévoile" (Qant, M. de R. avec Midjourney)

Après avoir identifié des problèmes de fiabilité de ses nouveaux modèles de fondation Gemini dans des langues autres que l'anglais, Google s’est résolu à reporter le lancement à l’an prochain. Selon The Information, les événements de lancement prévus en Californie, à New York et à Washington ont été annulés. Une première présentation aux journalistes et quelques VIP devrait cependant avoir lieu d’ici à la fin de la semaine.

En septembre dernier, Google avait accordé à un petit groupe de développeurs et d'entreprises un premier accès à l'un des modèles de la série Gemini (lire Qant du 18 septembre). Après la fusion de Deepmind et Google Brain, Gemini veut unir les mécanismes d’apprentissage profond de la première, qui ont donné de grands succès comme AlphaGo et AlphaFold, à l’architecture “Transformer” des LLM.

Créés par des chercheurs de Google (qui ont tous quitté l’entreprise : lire Qant du 7 septembre), les transformers ont fleuri partout ailleurs. De Lamda à Bard, en revanche, les modèles de Google ont déçu, malgré l’immense quantité de données à disposition pour leur entraînement.

Pour en savoir plus :

L’ÉVÉNEMENT

Gabriel Attal danse le MIA

Le ministre de l’Éducation nationale a présenté hier l'introduction progressive dans les classes de seconde de Modules Interactifs Adaptatifs (MIA), des solutions d’IA créées par une start-up parisienne, EvidenceB.

“Le robot donne la classe” (Qant, M. de R. avec Midjourney)“Le robot donne la classe” (Qant, M. de R. avec Midjourney)

À partir de l’an prochain, 200 000 élèves de seconde testeront un soutien en français et en mathématiques basé sur l’intelligence artificielle et les sciences cognitives. Ces Modules Interactifs Adaptatifs (MIA) ont été développés par EvidenceB, une edtech créée en 2017 par Thierry et Catherine de Vulpillières, rejoints par Didier Plasse et Philippe Mero. Ce pilote fait partie d'un ensemble de mesures annoncées par le ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal dans un mail adressé aux enseignants hier mardi. 

Les MIA seront proposés à tous les élèves de seconde à partir de la rentrée 2024. Ils sont présentés comme un outil souverain, propriété de l’État. L’IA propose des exercices personnalisés : grâce à un algorithme d’apprentissage par renforcement, elle apprend des difficultés de chaque élève pour s'adapter à son niveau et ses besoins. Au-delà des exercices, MIA offrira des ateliers collaboratifs et plus de 300 tutoriels vidéo, tant pour les élèves que pour les enseignants. Ces derniers disposeront d’un tableau de bord pour suivre la progression des lycéens. L'outil est conçu pour fonctionner comme un complément au travail en classe, offrant un soutien personnalisé à domicile. 

Pisa : la France penche

Cette approche individualisée veut répondre aux résultats inquiétants de l'étude Pisa 2022, qui a mis en lumière une baisse significative du niveau des élèves français en lecture et en mathématiques. Publiée hier, Pisa (Programme for International Student Assessment) montre la baisse de niveau la plus importante observée pour l'Hexagone depuis que l'enquête existe. La France pointe à peine au-dessus de la moyenne des pays de l'OCDE, à des années-lumière des meilleurs élèves asiatiques (Singapour, Japon et Corée du Sud). L’ensemble des systèmes éducatifs européens et américains sont en recul.

« Le plus gros changement dans l’éducation, en termes d’impact, sera la personnalisation. Aujourd’hui, les professeurs peuvent créer du contenu adapté à chaque étudiant » observait le VC Luben Pampulov (GSV Ventures) le 12 octobre dernier, à l’occasion d’un événement réservé aux abonnés de Qant. Reste à voir si cela fera remonter les lycéens français dans les classements Pisa. 

Pour en savoir plus : 

Tous ensemble, tous ensemble contre OpenAI

Meta et IBM, rejoints par une cinquantaine d’entreprises, viennent de lancer l’AI Alliance. L’initiative veut mettre en avant un développement responsable de l’IA en open source.

“L’alliance des robots” (Qant, M. de R. avec Midjourney)“L’alliance des robots” (Qant, M. de R. avec Midjourney)

AMD, Dell, Hugging Face, Intel, Oracle, Sony, Stability AI… L’AI Alliance que Meta et IBM viennent de lancer compte une pléiade d’instituts de recherche et d’universités (du Cern à la Nasa, de Harvard à Stanford), mais aussi des acteurs de poids sur le marché. Les fondateurs expliquent vouloir mettre en avant une innovation "ouverte et transparente", une critique à peine voilée à OpenAI, qui a quitté le monde de l’open source lors du lancement de GPT-4 (lire Qant du 15 mars).

L’objectif premier est d'augmenter le nombre de modèles de fondation en open source, par opposition aux systèmes propriétaires privilégiés par OpenAI, Anthropic, Microsoft et Google. Face à ceux qui soulignent la facilité avec laquelle les hackers désactivent les garde-fous intégrés dans les modèles open source (cet été, Llama 2 a été “jailbreaké”, débridé, en 48 heures), et le risque de diffusion incontrôlée de connaissances dangereuses (lire Qant du 20 novembre), l’Alliance s’attache à la création d'un catalogue d'outils de sécurité, de sûreté et de confiance vérifiés. Elle produira des contenus éducatifs pour informer le grand public et tenter d’orienter les décideurs politiques sur les avantages, les risques et la régulation de l'IA. 

L’Alliance veut également lancer de nouveaux benchmarks (comme Gaia : lire Qant du 5 décembre) et favoriser l’émergence de nouveaux matériels. On note l’absence de Nvidia, alors qu’AMD et Intel ont répondu présent.

Pour en savoir plus : 

L’ESSENTIEL : BlackRock, Binance, Cornell, Getty Images, Hugging Face, Meta, Microsoft, Nvidia, Stability AI, Société Générale, Vast Data

ROBOTS

Un escargot pour nettoyer les océans

En imitant le mouvement d’un escargot hawaïen, une équipe de chercheurs a développé un robot capable d’aspirer les microplastiques de la surface des océans.

Des chercheurs de l'université Cornell se sont inspirés du mouvement ondulant d'un escargot hawaïen pour développer un prototype de robot capable de collecter les microplastiques à la surface des océans, des mers et des lacs. Ce robot imite la technique des escargots qui aspirent les particules alimentaires flottantes dans les aquariums. 

Les méthodes actuelles de collecte des déchets plastiques, principalement basées sur l'utilisation de filets de traîne ou de tapis roulants, se révèlent inefficaces pour récupérer les microplastiques. Ces particules, souvent ingérées par la faune marine et intégrées dans la chaîne alimentaire, posent un risque sanitaire majeur, notamment en raison de leur potentiel cancérigène pour l'homme. Selon les Nations Unies, les déchets plastiques constituent 80 % de la pollution marine, avec 8 à 10 millions de tonnes de plastique rejetées dans les océans chaque année.

Les chercheurs ont utilisé une imprimante 3D pour créer une feuille souple en forme de tapis capable d'onduler. Une structure hélicoïdale sous le tapis, tournant comme un tire-bouchon, provoque une ondulation et crée une vague de déplacement sur l'eau. Le prototype, bien que petit, fonctionne avec seulement 5 volts d'électricité et est capable d'aspirer efficacement l'eau. Cependant, en raison du poids de la batterie et du moteur, un dispositif de flottaison pourrait être nécessaire pour empêcher le robot de couler. 

Pour en savoir plus : TechXplore

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

  • Ne jamais laisser traîner ses jetons : Au même moment où se lance l’AI Alliance, des chercheurs de Lasso Security ont découvert presque 1 700 jetons d'API exposés sur Hugging Face et Github, donnant accès aux comptes de 723 organisations, y compris des géants technologiques comme Meta, Microsoft et Google. Ces jetons permettent souvent des modifications de fichiers. Ils auraient pu être exploités pour voler des données, polluer des données d'entraînement ou dérober des modèles d'IA. Ce faisant, les chercheurs ont obtenu un plein accès à trois modèles open source, Llama de Meta, Bloom de HuggingFace et Pythia d’EleutherAI.
    Pour en savoir plus:
    The Register

  • Les républicains américains utilisent (encore) l’IA pour faire peur : Aux États-Unis, le Comité national républicain du Congrès (chargé du soutien des candidats républicains à la Chambre des représentants) a diffusé une publicité générée par IA représentant des parcs nationaux américains comme le Grand Canyon envahis par des tentes attribuées à des immigrants sans papiers. Cette publicité attaque notamment les élus démocrates pour avoir bloqué un projet de loi interdisant l'utilisation de terres publiques pour loger temporairement les migrants demandant l'asile. En avril dernier, le parti républicain avait déjà généré une vidéo simulant un second mandat de Joe Biden marqué par des catastrophes (lire Qant du 27 avril).
    Pour en savoir plus:
    New Republic

  • La guerre Getty-Stability aura bien lieu : Un tribunal britannique s’est déclaré compétent sur le procès intenté par Getty Images contre Stability AI, créateur de Stable Diffusion. Getty avait accusé Stability AI d'avoir utilisé sa bibliothèque d'images protégées par le droit d'auteur pour entraîner ses modèles d'IA (lire Qant du 8 février). Stability AI avait tenté de faire rejeter l'affaire en arguant que ni le développement ni l'entraînement de Stable Diffusion n'avaient eu lieu au Royaume-Uni, mais le tribunal a jugé que des preuves fournies par la société et son PDG Emad Mostaque étaient soit inexactes, soit incomplètes.
    Pour en savoir plus:
    The Verge, The Telegraph

  • Nvidia tend la main au Japon : Le CEO de Nvidia, Jensen Huang, a déclaré lors d'une visite au Premier ministre Fumio Kishida à Tokyo que son entreprise ferait de son mieux pour fournir des processeurs d'intelligence artificielle au Japon, en réponse à une forte demande sur le marché. Cette annonce intervient alors que le Japon s'efforce de reconstruire son infrastructure de semi-conducteurs, autrefois leader mondial, et de rattraper son retard dans le développement de la technologie IA. Le pays a notamment adopté un budget supplémentaire incluant environ 2000 milliards de yens (environ 12,5 milliards d’euros) pour les investissements dans les semi-conducteurs. Une partie de ces fonds doit soutenir le fabricant de puces taïwanais TSMC et l'entreprise japonaise Rapidus.
    Pour en savoir plus:
    Reuters, Bloomberg

  • Vast Data vise toujours plus haut : Vast Data, une startup dans le domaine de l'IA et du stockage soutenue par Nvidia, a été valorisée à plus de 9 milliards de dollars après un tour de financement dirigé par Fidelity Investments. La société, qui s'attend à générer plus de 100 millions de dollars de chiffre d’affaires en 2023, prévoit d'utiliser une partie de ces fonds pour racheter des actions.
    Pour en savoir plus:
    The Information

  • L’IA joue au chien d’aveugle : L'application Seeing AI de Microsoft, conçue pour aider les personnes aveugles ou malvoyantes à mieux comprendre le monde qui les entoure grâce à la narration assistée par IA et la caméra de leur smartphone, est désormais disponible sur Android et accessible en 18 langues. Cette application offre des fonctionnalités telles que des descriptions détaillées d'images, la lecture de textes et de codes-barres, l'identification de personnes et d'expressions faciales, ainsi que la reconnaissance de texte manuscrit dans certaines langues.
    Pour en savoir plus:
    Engadget

BLOCKCHAINS

  • Sur la blockchain, la Générale a la main verte : La Société Générale a émis son premier "green bond" numérique d'une valeur de 10 millions d'euros sur une blockchain publique, Ethereum. Cette transaction, souscrite entièrement par AXA Investment Managers et Generali Investments via un placement privé, utilise des tokens de sécurité représentant la propriété d'actifs financiers traditionnels. AXA IM s’est procuré tout d’abord des stablecoins euros de la SG, les EurCV, avec lesquels elle a acheté les obligations. La semaine dernière, la Société Générale a participé, aux côtés de Goldman Sachs et Santander, à la deuxième émission d’obligations numériques de la BEI, mais sur une blockchain privée.
    Pour en savoir plus:
    Reuters

  • Une CBDC pour les îles Salomon : Les Îles Salomon ont annoncé leur intention d'explorer une monnaie numérique de banque centrale (CBDC) en lançant un projet pilote en partenariat avec l'entreprise japonaise Soramitsu pour tester un système expérimental appelé Bokolo Cash. Cette CBDC, qui sera acceptée comme monnaie légale dans le cadre du projet pilote, vise à améliorer l'inclusion financière et à explorer les fonctionnalités de paiement transfrontalier via la blockchain.
    Pour en savoir plus:
    CoinGeek

  • BlackRock amorce son ETF bitcoin : Bien que son fonds fasse  partie des 13 demandes en attente d'approbation réglementaire, BlackRock a déjà vendu pour 100 000 dollars des parts de son futur fonds négocié en bourse (ETF) basé sur le bitcoin (lire Qant du 24 novembre). Cet investissement initial permettra de financer la création d'unités sous-jacentes à l'ETF, permettant ainsi sa négociation sur le marché ouvert. Le "iShares Bitcoin Trust" proposé par BlackRock investira directement dans des bitcoins plutôt que dans des contrats à terme liés à la cryptomonnaie.
    Pour en savoir plus:
    Coindesk

  • CZ pourrait encore faire de la prison : L'ancien CEO de Binance, Changpeng Zhao, est contraint de rester aux États-Unis suite à une décision judiciaire, après avoir plaidé coupable de violation des lois américaines sur la lutte contre le blanchiment d'argent (lire Qant du 22 novembre). Dans le cadre de l’accord qui a mené à sa démission et au paiement d’une amende de 4 milliards de dollars par Binance, CZ a accepté de ne pas faire appel pour une peine allant jusqu'à dix-huit mois de prison.
    Pour en savoir plus:
    Reuters

AR-VR-XR

  • Plus de SMS dans le Quest : Meta vient d'annoncer la suppression de la fonctionnalité qui permettait aux utilisateurs de ses casques Quest de voir les notifications de leur smartphone dans leur casque. À la place, les utilisateurs devront utiliser la fonction de passthrough, qui permet de voir l'environnement réel à travers les caméras du casque, pour consulter leur téléphone.
    Pour en savoir plus:
    The Verge

EXPERT : Katharina Pistor

À nouveau, le capital prévaut sur l’éthique

La saga d'OpenAI, au cours de laquelle le fondateur et CEO Sam Altman a été soudainement licencié puis réintégré, avec un nouveau conseil d'administration, a peut-être été passionnante, mais elle n'était ni nouvelle ni surprenante. Historiquement, quand il existe des visions concurrentes de l'avenir d'un produit ou d'un modèle d'entreprise innovant, les intérêts capitalistiques l’emportent.

“Katharina Pastor vue par Midjourney”“Katharina Pastor vue par Midjourney”

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