Pendant que l'explosion des valorisations de l'IA interroge, les robots écrivent des récits fictionnels, et Dall-e 3 débarque sur ChatGPT. Bienvenue dans Qant, lundi 23 octobre 2023.
« Le progrès est devant nous, à condition de dépasser sa propagande » Paul Virilio
Chaque jour, les journalistes de Qant illustrent les tendances de fond qui animent la tech. Ils s’appuient sur Kessel Média et utilisent l’IA générative depuis mars 2022.
"La bulle dorée de l'IA" (Qant, M. de R. avec Midjourney)
La rumeur d’un mega-deal pour OpenAI se précise. Selon The Information, la société d'investissement Thrive Capital mène une transaction pour acheter des actions d'OpenAI auprès des employés, valorisant ainsi la société à au moins 80 milliards de dollars (lire Qant du 27 septembre). Fondée par Josh Kushner, frère du gendre de Donald Trump Jared Kushner, Thrive avait participé au tour précédent, fin avril, qui valorisait OpenAI 27 milliards à 30 milliards de dollars (lire Qant du 3 mai).
Entre deux, OpenAI n’a pas présenté de nouveau modèle aussi révolutionnaire que GPT-4, fin mars. Au contraire, le développement d’un éventuel GPT-5 semble contrarié (lire Qant du 19 octobre). Qu’est-ce qui peut justifier un triplement de sa valorisation, hormis ce que le gouverneur de la Federal Reserve appelait, pendant la bulle Internet de la fin des années 1990, une “exubérance irrationnelle” de la part des investisseurs?
Certes, OpenAI a réalisé quelque 130 millions de dollars de chiffre d’affaires en septembre, contre 28 millions pour tout 2022. Et après quelques mois de creux pendant de l’été, la croissance de ChatGPT a repris légèrement. Faire fi pour autant des incertitudes, notamment réglementaires, et valoriser la start-up 60 fois son chiffre d’affaires annualisé requiert un acte de foi très spécifique.
Sam Altman a annoncé au printemps que, pour créer une intelligence artificielle générale (AGI), OpenAI devrait lever quelque 100 milliards de dollars. Une double perspective qui peut enthousiasmer un capital-risqueur. Le fondateur de SoftBank Masayoshi Son, par exemple, prévoit que l’apparition d’une AGI (intelligence artificielle générale) dix fois plus intelligente que l’homme dans dix ans (lire Qant du 6 octobre) déclenchera une immense création de richesses.
Surtout, l’on peut considérer qu’en mettant la main sur des actions OpenAI si tôt dans son parcours – la start-up n’a levé “que” 11 milliards de dollars –, il sera possible de les revendre à un bien meilleur prix. Le mois dernier, une étude de Goldman Sachs montrait que l’engouement pour l’IA n’a touché pour l’instant que les sociétés en bénéficiant immédiatement : les effets boursiers de la percée de l’an dernier dans les LLM ne font que commencer.
Seul un petit groupe de sociétés a bénéficié en Bourse d'un effet IA. Source : Goldman Sachs Intelligence
L’auteur de l’étude, Peter Oppenheimer, souligne que les entreprises concernées par de fortes hausses de leur valorisation gardent des fondations solides et des retours sur investissement élevés. Le ratio prix/bénéfice moyen des entreprises américaines de l’IA est de 25, soit la moitié du ratio moyen des entreprises concernées par la bulle Internet il y a vingt-cinq ans, qui était de 52. La vague de l’IA peut donc encore gonfler en Bourse.
En amont, le succès de ChatGPT a conduit tous les investissements à se concentrer sur elle : la semaine dernière encore, Bloomberg et Pitchbook ont documenté le contraste entre le boom de l’IA et le ralentissement global du reste de la tech (lire Qant du 19 octobre). En un an, les investissements dans les start-ups d’IA ont connu une hausse de 27% à l’échelle mondiale, pour culminer à 17,9 milliards. Une performance faisant figure d’exception au milieu de l’écosystème des start-ups, dans lequel les investissements ont diminué de 31% en un an.
Certes, il reste quelques esprits chagrins. Au mois d’août, le Wall Street Journal osait le pas en comparant les valorisations de l’IA avec la bulle internet, citant le triplement de la valeur des actions de Nvidia en un an. Parmi les facteurs de doute, la consommation énergétique causée par les outils d’IA (même si celle-ci demeure difficile à quantifier, lire Qant du 20 octobre) ; la dépendance de la plupart des start-ups aux modèles pré-entrainés en raison des coûts de formation de leur propre modèle ou simplement le risque règlementaire, au cas où le modèle européen ferait tache d’huile.
Pour en savoir plus:
D’après The Information, SoftBank est en pourparlers pour investir dans 1X Technologies, une entreprise norvégienne spécialisée dans la robotique humanoïde que OpenAI avait précédemment financée. a évoqué une levée de fonds dirigée par SoftBank d’un montant compris entre 75 et 100 millions de dollars, avec une valorisation pré-investissement de 375 millions de dollars.
Située non loin d'Oslo, 1X Technologies avait précédemment levé 23 millions de dollars, notamment auprès d'OpenAI. Elle compte environ 100 employés. Par rapport aux robots traditionnels limités à des tâches spécifiques, les prototypes androïdes de 1X peuvent marcher, courir, monter des escaliers, ramasser des objets et imiter les expressions et gestes humains. Ils utilisent des LLM pour ce faire, d’où la synergie avec OpenAI qui avait présenté une plateforme de robotique autonome en 2017, mais s’est depuis éloignée du secteur.
SoftBank dispose déjà d’un track record positif en la matière : elle a acquis Boston Dynamics pour un peu plus de 100 millions de dollars en 2017 avant de la revendre en 2021 à Hyundai pour 1,1 milliard de dollars. Et son intérêt pour 1X rappelle la rumeur selon laquelle Sam Altman d'OpenAI, le designer ex-Apple Jony Ive et le PDG de SoftBank, Masayoshi Son, travailleraient sur un appareil personnel alimenté par l'intelligence artificielle (lire Qant du 29 septembre).
Dall-e 3 débarque sur l’app ChatGPT : OpenAI étend l'accès à son générateur d’images, Dall-e 3, aux abonnés ChatGPT Plus et Enterprise au sein de l'application ChatGPT. Face aux controverses sur les générations d'images problématiques, OpenAI affirme avoir renforcé les mesures de sécurité pour Dall-e 3, incluant des outils pour limiter les contenus tendancieux et pour détecter avec précision si une image provient de Dall-e 3.
Pour en savoir plus: The Verge
L’IA, partie du problème de Jon Stewart : L'émission "The Problem With Jon Stewart" sur Apple TV Plus a été annulée. Selon le New York Times, alors que de nouveaux épisodes devaient être tournés dans quelques semaines, des désaccords entre Apple et le présentateur Jon Stewart sur certains sujets, dont l'intelligence artificielle et la Chine, ont conduit à l'arrêt de la production et au départ de Jon Stewart.
Pour en savoir plus: The Verge
Une puce d’IBM en pole (nord) : Dans un article sur Science la semaine dernière, des chercheurs d'IBM ont présenté une puce baptisée Northpole. Inspirée du cerveau humain, elle mêle calcul et mémoire dans le même circuit. Cela rend Northpole capable d'exécuter des opérations d’IA comme la reconnaissance d'images 22 fois plus rapidement que les puces comparables et avec 25 fois plus d'efficacité énergétique. D’après les chercheurs, cette technologie pourrait avoir des implications importantes pour les véhicules autonomes, des voitures aux avions.
Pour en savoir plus: New Scientist
Le Tensor RT-LLM, nouvelle arme de Nvidia : Nvidia vient de présenter une bibliothèque open source optimisée pour ses GPU: TensorRT-LLM, conçue pour faciliter le développement d’applications basées sur des LLM et surtout améliorer les performances de l’inférence sur les puces H100. Elle intègre dans une API Python, entre autres, le compilateur d’apprentissage profond de TensorRT et les noyaux optimisés de FasterTransformer. La solution a été développée en collaboration avec de nombreuses entreprises d’IA, notamment Meta, Cohere, Grammarly et la française Mistral AI.
Pour en savoir plus: The Verge
La BCE fait avancer l’euro numérique en dépit des résistances : Alors que la BCE lancera le 1er novembre la phase de préparation de l’euro numérique, le Financial Times met en garde le Vieux Continent. Cela pourrait entraîner une réduction des profits des banques jusqu'à 20%, et donc les fragiliser, avec le risque d'un retrait massif des dépôts.
Pour en savoir plus: Financial Times
Plus de vagues pour Ripple: La SEC, le gendarme de la bourse américaine a renoncé à faire appel contre Ripple, émetteur de la cryptomonnaie XRP au sein d’un système de paiements plus vaste, et ses cofondateurs. Dans un jugement salomonique en juillet, un tribunal de première instance à New-York avait reconnu que les plaintes de la SEC étaient fondées pour les ventes de crypto-actifs aux institutionnels, mais non aux particuliers. En se contentant d’une demi-victoire, la SEC pourra concentrer ses ressources sur deux gros poissons : Coinbase et Binance (lire Qant du 29 mars et du 8 juin).
Pour en savoir plus: Wall Street Journal
Une bande de fréquence pour l’AR : La Commission fédérale des communications (FCC) des États-Unis vint d’accorder la bande de fréquences de 6GHz pour des dispositifs sans fil. Plusieurs géants technologiques, dont Microsoft, Google, Apple et Meta, avaient sollicité cette bande de fréquence dès 2019, espérant ainsi faciliter le développement de technologies telles que les lunettes de réalité augmentée. Mieux vaut tard que jamais.
Pour en savoir plus: CNBC
Les entreprises en retard pour la cybersécurité post-quantique : Selon une enquête menée par l'Institut Ponemon pour l’autorité de certification privée américaine Digicert, 61% des entreprises interrogées estiment qu'elles ne pourront pas gérer les implications de l’informatique quantique sur la sécurité. De plus, 74% des répondants craignent que leurs données soient actuellement ciblées par des cybercriminels pour être déchiffrées dans le futur avec la montée de l'informatique quantique.
Pour en savoir plus: ZdNet
"Le robot rédige sa première nouvelle" (Qant, M. de R. avec Midjourney)
On sait grâce à Thierry Murat qu’il est possible d’illustrer un roman graphique entièrement grâce à l’IA (lire Qant du 3 octobre). Mais l’auteur d’Initial_A a rédigé le scénario entièrement seul, sans aide d’outils d’IA. Qu’en-est-il des générateurs de texte nouvelle génération ? Cette semaine nous testons les capacités de deux outils, Sudowrite et Reword, à générer des récits fictionnels.
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